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6 septembre 2022 2 06 /09 /septembre /2022 17:45

 

            Dans le cadre de la rencontre organisée le 17 juin à Marseille par l’IMéRA (Université Aix-Marseille) sur le thème du « Coran vécu », j’ai traité la problématique suivante : comment la population générale, la société civile et la classe politique font elles face au Coran et au code pénal dans le champ sexuel marocain ? Comment se positionnent-elles plus précisément face aux sexualités non maritales explosives ?

            Dans ce cadre, je me suis posé quatre questions subsidiaires : 1) quelles sont les ruptures et les continuités entre sanctions coraniques[1] et sanctions juridiques contre la sexualité non-maritale? 2) Comment le code pénal résiste-t-il à la revendication réformiste en étant lui-même coranisé, c’est à dire perçu comme une expression moderne du Coran? 3) Pourquoi les partis politiques ne s’impliquent-ils pas dans le projet de la réforme du code pénal ? Quelle est la raison de leur absentéisme en la matière ? 4) Comment seule une critique historico-critique du Coran (en matière sexuelle), une fois adoptée par des forces politiques, et une fois vulgarisée et popularisée à travers les mass-médias publics à large audience, représente-t-elle la seule issue pour venir à bout des résistances anti-réformistes liberticides?

 

            1-Ruptures et continuités

 

            Etabli en 1962, le droit pénal marocain rompt avec le Coran à travers trois substitutions: 1) d’abord une substitution terminologique : la notion de liwat (homosexualité masculine) cède la place à celle d’acte contre nature (article 489, pénalisant le lesbianisme aussi, ce qui n’est pas pénalisé dans le Coran, la notion de zina ghayr al-Muçane (fornication du célibataire) est remplacée par celle de la « débauche » (fassad/article 490) tandis celle de zina al Muhçane (fornication du marié) cède la place à celle d’« adultère » (khyana zaoujia/article 491). Ensuite une substitution de la valeur : le zina comme  Kabira (grand péché/crime) est rabaissé au rang d’une simple junha (délit), 3) Une substitution pénale :  le hadd (sentence : fouet, exil, lapidation) est remplacé par celle le ‘iqab (punition : prison et/ou amende).

            Il y a donc un abandon de la terminologie coranique et de la grande charge transgressive accordée par le Coran à la fornication. Cet abaissement de la valeur antisociale et juridique de la sexualité non maritale explique à la fois la moindre gravité des sanctions pénales ainsi que la plus grande facilité d’établir la preuve de la débauche ou de l’adultère. Il y a donc une rupture dans les modes de preuve lorsqu’on passe du Coran au code pénal.

            Pour le Coran, le témoignage quatre témoins oculaires crédibles de la pénétration sexuelle constitue la preuve suprême, mais toutefois quasi-impossible, de la fornication. Les foqaha vont même jusqu’à déconseiller le témoignage en la matière pour ne pas divulguer la turpitude au sein de la Umma. L’aveu constitue le deuxième mode de preuve. Toutefois, il doit être libre et volontaire, répété quatre fois espacées dans le temps (selon les foqaha), avec la possibilité de se rétracter et de s’enfuir lors de l’exécution de la sentence sans être poursuivi (toujours selon les foqaha). La femme accusée d’adultère par un mari qui n’a pas de témoins peut échapper à la sentence grâce au procédé de l’anathème (Al-li’an اللعان).

            Contrairement au Coran, le droit pénal facilite l’établissement de la preuve et de l’adultère. Le premier mode de preuve est l’établissement par un officier de police d’un procès-verbal du flagrant délit non pas sur la base d’un visionnement de la pénétration sexuelle, mais uniquement sur des indices, des présomptions (être seuls dans une chambre, présence de lingerie, de préservatifs, de vin…). L’officier de police se rend sur les lieux du délit de débauche ou d’adultère sur la base d’une information donnée par un voisin, un concierge, un mari… Contrairement donc au Coran, le code pénal prend en compte la dénonciation de la débauche et de l’adultère par des tiers. Le deuxième mode de preuve est l’aveu à travers des écrits de l’accusé (lettres, publications…). Le procès-verbal établi par l’officier de police et signé par l’accusé est considéré comme un aveu écrit. Enfin la reconnaissance volontaire et libre du délit devant un juge d’instruction ou devant le parquet constitue le troisième mode preuve. Autant dire des modes de preuve fragiles et contestables par les défenseurs des droits humains.

            Malgré ces ruptures, malgré la suspension de la loi coranique en matière de sexualité non-maritale, le code pénal est socialement perçu comme un représentant fidèle du Coran. Aux yeux de la population générale, le plus important, c’est le fait que le code pénal maintient la prohibition coranique de la fornication en la transformant en interdiction juridique de la sexualité non maritale. Ce faisant, le code pénal est coranisé à son tour. Il n’est qu’une sécularisation juridique formelle, non perçue et/ou minorisée en tant que telle. La coranisation sociale du code pénal est un substitut au littéralisme coranique. Elle en est la protectrice. Une fois coranisé, le code pénal résiste à la revendication réformiste exprimée par une partie de la société civile sur la base d’une explosion sexuelle prémaritale, extra-maritale, prostitutionnelle et homosexuelle. D’où le refus majoritaire de sa réforme à travers l’abrogation des articles 489, 490 et 491.


            II- Discorde autour de la réforme du Code pénal

 

            En effet, la société marocaine connaît une explosion sexuelle
malgré la double répression exercée contre la sexualité non maritale par le Coran et par le code pénal. Plus de 80% de jeunes ont des relations sexuelles avant le mariage (Ministère de la Santé, 2013) même si selon un sondage d’opinion auprès de la population générale, 80% de Marocain(e)s seraient contre les relations non-maritales. De son côté, en 2019, la justice marocaine a poursuivi 15.192 personnes pour "débauche", 3.270 pour adultère, 283 pour homosexualité et 107 pour avortement. Ce n’est là que la partie apparente de l’iceberg de la sexualité illégale et/ou «perverse ». De nombreuses autres études et enquêtes confirment l’explosion sexuelle. Le pouvoir judiciaire ne peut pas contrôler toutes les relations sexuelles illégales afin de les poursuivre car la transgression de la prohibition coranique et de l’interdiction juridique devient structurelle et chronique. En fait, l’explosion sexuelle indique une sécularisation pratique des pratiques sexuelles, une autonomisation de ces pratiques sexuelles par rapport à l’islam malgré la persistance de l’islam comme référence sacro-sainte suprême en la matière pour les Marocains lambda.

            Cependant, des intellectuels et des activistes réalistes prennent en considération l’explosion sexuelle comme un fait social établi et irréversible pour demander l’abrogation des articles 489, 490 (et 491, en demandant que l’adultère cesse d’être affaire pénale pour devenir une affaire civile). L’abrogation est demandée pour des raisons commerciales aussi : « je pourrais remplir mon hôtel à 100 % si seulement ils levaient la loi», affirme Meryem Zniber qui dirige un resort dans les montagnes du Rif.

            Cette demande d’abrogation des articles répressifs a été exprimée dès 2007 par Abdessamad Dialmy, reprise par le « Printemps de la Dignité » en 2010, par l’AMDH en 2012, par le collectif « Hors-loi » et par le « Conseil National des Droits Humains » en 2019. Celui-ci a en effet adressé un mémorandum aux parlementaires lors de de l'examen du projet de réforme du Code pénal. Dans ce mémorandum, le CNDH revendique les libertés sexuelles (y compris pour les LGBT) et le droit à l’avortement quand la grossesse met en danger la santé physique, mentale et sociale de la femme enceinte. La présidente du CNDH, Amina Bouayache, « estime nécessaire de ne pas impliquer le code pénal dans les relations individuelles et intimes entre adultes consentants ».

            Face à ce mouvement social organisé, un autre mouvement social,  tout aussi organisé, l’islamiste en l’occurrence, s’est dressé contre la demande d’abrogation des articles liberticides la sexualité non maritale. Ainsi, l’association « Mawadah pour le développement social et familial » a publié une pétition en ligne pour dénoncer les « libertés pornographiques » (même si personne ne réclame ces libertés). Elle rejette les manifestations appelant à la « liberté sexuelle » qui  « ne servent que les agendas sauvages de la mondialisation et de l’impérialisme qui ne respectent ni les religions ni les spécificités nationales et ethniques ».

            Des islamistes notoires se sont également dressé contre l’abrogation des articles sexuellement liberticides. A titre d’exemple, pour Abdeslam Fizazi (un islamiste radical repenti), supprimer l’article 490 serait violer le Coran et la Sunna. Et d’ajouter : « supposons qu’il y ait non poursuite judiciaire, qui va la supprimer du Livre d’Allah et de la Sunna de son prophète »? Fizazi oublie que personne ne demande de la supprimer du livre d’Allah et que les libertaires demandent seulement que l’Etat ne prenne pas en charge la poursuite des rapports sexuels consentis entre adultes. Et à ceux-ci de régler leur compte avec Dieu de manière individuelle et privée. Benhamza va plus loin en affirmant que supprimer les articles liberticides serait une « ridda », c’est à dire une régression à l’époque préislamique (Jahilya) et une apostasie, une sortie de l’islam. En d’autres termes, l’Etat qui aurait l’impudence/l’imprudence d’abroger ces articles serait un Etat apostat, non habilité à gouverner au nom de l’islam, politiquement illégitime par conséquent. Une fatwa politiquement menaçante ! Là, Benhamza coranise le Code pénal et demande implicitement dans sa « fatwa » que le code pénal soit sacralisé en matière sexuelle comme l’est le Coran. Pour lui, pas de rupture entre le Coran et le code pénal. Cette « fatwa » a été implicitement désavouée par le « Conseil Supérieur des Ouléma », le seul à être habilité à promulguer des « fatwas » officielles. Tout en étant membre de ce Conseil, ce Conseil, présidé par le Roi, ne se prononce pas contre la demande s’abrogation. Le Conseil laisse entendre ainsi qu’il refuse de coraniser le code pénal, de confondre Coran et code pénal.

 

            III- L’absentéisme politique dans la lutte pour les droits sexuels


            Face aux droits sexuels en tant que droits humains, c’est le PJD, le parti islamiste qui a la part « belle ». Son attitude conservatrice liberticide et anti-réformatrice trouve beaucoup d’écho au sein d’une population générale analphabète en matière de droits humains. Benkirane et El Otmani n’ont pas cessé durant leurs mandats (2011-2021) de critiquer les organisations et les intellectuels qui « militent pour la dépénalisation de l’avortement et pour d’autres libertés individuelles que la loi islamique considère comme illicites (haram). Dans leur sillage, El Moukri Abouzeid, député et membre dirigeant du PJD affirme que "tout acte sexuel en dehors du mariage est un acte de débauche, un crime". Dans cette déclaration, Abouzeid marie involontairement entre débauche et crime, délit et kabira, code pénal et Coran.

            Contrairement au PJD et aux partis conservateurs (anti-abrogation) et libéraux qui ne se prononcent pas clairement sur la question de l’abrogation des articles liberticides, les partis de la gauche sont en théorie favorables à l’abrogation, mais ils restent bloqués dans leurs pratiques électorales et programmes au sujet des droits et des libertés sexuels.

            Pire, en 2006, dans un article publié dans Al Ittihad Al Ichtiraki, intitulé « La bataille sexuelle arrivera inéluctablement », Dialmy s’était livré à une critique de Driss Lachgar, l’actuel leader de l’USFP, à propos de son attitude à l’égard de la sexualité non-maritale.  Lors d’une émission télévisée, Lachgar exigeait que ce soient les autorités publiques seules qui sévissent contre ceux qui pratiquent une sexualité non-maritale. Il refuse que des groupuscules islamistes se chargent de la défense de la morale sexuelle islamique en harassant publiquement ceux qui transgressent cette morale à travers leurs comportements « impudiques ». Lachgar est contre l’exercice du taazir, c’est à dire contre les violences physiques et/ou symboliques (verbales) que font subir les islamistes radicaux contre les couples dans l’espace public. Selon lui, ce sont les pouvoirs publics seuls qui ont le droit de protéger la morale publique, islamique sous-entendue. C’est déjà là et en soi une attitude conservatrice anti-libertaire de la part d’un parti politique de gauche progressiste qui a été un acteur fondamental dans la réforme du Code du Statut personnel. Mais plus encore, lors de son intervention télévisée, Lachgar utilise le terme coranique fahicha (turpitude) pour non seulement nommer les relations sexuelles non-maritales comme le fait le Coran, mais aussi pour soutenir leur condamnation et poursuite par les autorités judiciaires sur la base du code pénal ! Ce faisant, Lachgar demande aux seuls pouvoirs publics d’intervenir pour condamner la fahicha/zina/fornication au nom du code pénal ! Là encore, il y a coranisation du code pénal. Au lieu de défendre la liberté sexuelle en tant que représentant d’un parti socialiste, Lachgar se prononce pour la pénalisation de la sexualité non-maritale/fahicha en coranisant le code pénal, et à travers lui les notions de « débauche » et d’« adultère ».

            Pourquoi l’USFP en tant que parti socialiste n’a -t-il jamais revendiqué l’abrogation des articles 489, 490 et 491 répressifs de la sexualité non-maritale ? Par définition, cette abrogation reste une demande politique de fond inscrite dans l’ADN de tout parti politique de gauche. Des considérations malheureuses de calcul électoral ont malheureusement conduit jusqu’à présent les grands partis de la gauche marocaine à refouler dans leur inconscient électoral et programmatique la revendication des libertés et des droits sexuels.

            La gauche ne soutient pas les droits et les libertés sexuels par peur de perdre des élections et des sièges dans les assemblées (de la commune au parlement). Le principe est là, mais sa mise en œuvre est absente. Une exception à cet état de fait : l’engagement programmatique de l’  « Alliance de la fédération de gauche » qui a consacré un volet de son programme aux questions relatives aux libertés individuelles et à l’abrogation des articles 489, 490 et 491. L’un de ses députés à la chambre des représentants, Omar Balafraj, a posé la question de l’abrogation de ces articles au sein de parlement. La question est restée inaudible, sans suite aucune.

            Et lors de la campagne des élections législatives en 2021, il y eu l’engagement déclaratif du Secrétaire Général du PPS en faveur de l’abrogation, mais cet engagement est totalement absent de la campagne électorale du parti et de ses programmes». Pour la gauche, la lutte pour les droits sexuels est une carte électorale et politique perdante.

            En plus du calcul politique, et à l’appui de la timidité politique des partis de la gauche, il faut signaler l’inexistence de conventions ou de traités internationaux (qui reconnaissent les droits sexuels comme des droits humains) à signer et à ratifier par les Etats-Nations, et qui obligent ces Etats à y adapter leurs législations nationales. Il existe tout au plus des recommandations dans ce sens dans les plans d’action des conférences du Caire (1984) et de Pékin (1995). Il existe également des résolutions du « Conseil des Droits de l’Homme » (ONU/Genève) qui parlent des droits sexuels comme droits humains et qui invitent aux non-discriminations sexuelles et de genre. Mais ni les recommandations ni les résolutions ne sont légalement contraignantes. Chaque Etat-nation reste souverain en matière de politique sexuelle.

 

            IV-De la nécessité de « gauchiser » et d’étatiser la critique historique du Coran

 

            Que faire face à ce blocage de la réforme d’un code pénal coranisé en matière sexuelle ?

            Le Code pénal résiste parce qu’il découle d’une interprétation rhétorique du Coran qui voit en lui un texte divin imperméable à l’histoire. C’est à travers cette perspective que le verset coranique « N’approchez pas la fornication, c’est une turpitude et un mauvais chemin »   est utilisé pour contrôler croyants. L’enjeu est donc de libérer le Coran d’une interprétation rhétorique figée qui s’en est approprié le sens et passer ainsi à une théologie islamique différente, à une théologie de la libération. Car beaucoup d’autres versets servent aussi à légitimer un message d’égalité et de liberté.

            Le point de départ de la critique historique du Coran en matière de sexualité réside dans la question suivante :  pourquoi le Coran a -t-il prohibé la sexualité non-maritale ? Pourquoi l’a- t-il prohibé spécifiquement pour les femmes musulmanes, étant donné que les hommes ont/avaient le droit d’avoir une sexualité non maritale avec les concubines-esclaves ? L’exégèse dominante voit dans la fornication avec une célibataire un double risque : ne pas pouvoir établir la filiation patrilinéaire et exposer la progéniture à la négligence et à l’abandon. En d’autres termes, l’enfant né hors-mariage crée une confusion entre les liens (patrilignage) et entre les biens (héritage), ce qui crée une discorde entre la jeune fille et sa famille. Plus personne n’en voudra comme épouse.  Quant à la fornication avec une femme mariée, elle détourne l’épouse de son mari et la fera répudier. Dans les deux cas, la fornication suscite une jalousie qui conduit au désordre social et à des crimes d’honneur ou passionnels. En un mot, la virginité qui signifie coraniquement l’absence de toute relation sexuelle avant le mariage est en dernière analyse un contraceptif radical contre les grossesses illégales involontaires qui menacent l’ordre social patriarcal. La fidélité de l’épouse est également un préservatif contre les grossesses d’origine extra-maritale. Dans les deux cas, l’objectif est de garantir la sécurité patrilinéaire car le mari est légalement le père (l’enfant appartient au lit conjugal, même si le mari n’est pas le véritable géniteur, à moins d’un anathème qui conduira l’épouse adultère à la lapidation ou d’un test ADN qui la conduira à la prison). Dans le cas de la jeune fille, le géniteur est in-transformable en père juridique, « son eau est pareille à celle des autres » affirment les exégètes du Coran.

            Cette causalité de la prohibition coranique de la fornication est historique. Elle se situe dans un contexte social et historique précis, marqué par une absence plurielle, celle d’une contraception médicale efficace, celle d’un avortement médical sécurisé, celle d’un test ADN qui établit de manière scientifique la filiation biologique patrilinéaire, celle de la possibilité juridique d’une filiation matrilinéaire (la mère célibataire a désormais un statut juridique qui l’habilite à transmettre son propre patronyme à son enfant), ou celle du père biologique de se transformer en père-légal grâce à un acte de reconnaissance. Cette absence plurielle faisait de la sexualité non maritale une sexualité à risques inévitables.

            Aujourd’hui, tous ces risques sont évitables : la disponibilité de la contraception, de l’IVG, du test ADN et d’un cadre juridique adéquat. Par conséquent, la prohibition coranique de la sexualité non maritale n’a plus de raisons d’être maintenue dans le code pénal. La dépénalisation de la débauche (article 490), de l’adultère (article 491), de l’homosexualité (les LGBT ne sont ni malades ni pervers !) et de l’avortement (article 453, la doctrine hanafite par exemple l’autorise pour des considérations sociales comme le viol, l’inceste et la pauvreté) est dictée par le contexte actuel, lequel contexte rend caducs les facteurs sociaux de la prohibition coranique de la sexualité non maritale et de ses conséquences.

            Certes, cette critique historique du Coran en matière sexuelle est refusée par l’analyse rhétorique qui respecte intégralement la lettre du Coran. Selon les foqaha, la critique historique désacraliserait le Coran, un texte supra-historique par définition. Approche historique et Coran seraient incompatibles, irréconciliables. Cependant, ces mêmes foqaha ont toujours invoqué les causes de la révélation de chaque verset afin d’en contextualiser le sens et la portée. Il s’ensuit alors que le Coran est un texte historique progressivement révélé au prophète selon les circonstances et selon des moments précis de sa vie et de ses relations avec ses compagnons et son entourage au sens le plus large. Et c’est cela même que nous démontrons ici, tout simplement. Les versets du confinement, de l’exil, du fouettage et de la lapidation (abrogé/supprimé/repris par la Sunna) comme châtiments des fornicateurs et des fornicatrices ne sont pas indépendants des causes de leur révélation. Pourquoi alors n’appliquerait-on pas la logique des causes de la révélation aux versets condamnant la sexualité non-maritale?

            Cette approche historique critique que nous avons établie depuis 2012 et que nous ne cessons pas de rappeler et de développer reste encore inaudible pour la population générale, voire même pour les universitaires. Elle est encore plus inaudible auprès décideurs politiques : partis politiques, parlements, gouvernements...

            La tâche première qui s’impose est alors de sensibiliser ces différents acteurs à l’approche historique critique du pénalisme coranique en matière de sexualité. La gauche avec toutes ses composantes, de la « gauche de caviar » à la gauche la plus radicale est à cibler en premier lieu car c’est la gauche qui porte dans son ADN idéologique l’idéal de la libération sexuelle. Une fois dotée d’une logique coranique à la fois interne et historique, la réforme du code pénal sera plus facilement portée par des forces politiques qui l’intégreront dans leurs programmes et qui l’imposeront à la négociation politique. Sans un soutien politique, la réforme du code pénal n’aboutira pas. La preuve la plus patente est la non introduction de la dépénalisation de l’avortement dans le code pénal malgré les recommandations d’une commission royale. Celle-ci avait recommandé en 2015 de dépénaliser l’avortement dans les cas de la malformation congénitale du fœtus, de l’inceste et du viol, en plus du danger pour la vie de la mère. Ces recommandations ont été formulées pendant les deux mandats du gouvernement islamiste (dirigé par le PJD) qui, fort de sa majorité parlementaire, n’a rien fait pour dépénaliser l’avortement dans les trois cas susmentionnés. Aujourd’hui, les libéraux (RNI/PAM) vont ils le faire ? Ne seront-ils pas bloqués par l’Istiqlal, libéral certes, mais conservateur surtout. Il faut également sensibiliser tous ces partis, de leur sommet et à leurs bases pour espérer une réforme du code pénal en matière sexuelle.     

            En fait, l’interprétation du Coran a toujours été historique, et toujours engagée dans un sens anti-libertaire dans le champ sexuel. Il est temps de faire du Coran un texte propre à inspirer la réforme du code pénal en tant que composante d’une réforme sexuelle dont le Maroc a grandement besoin. Cette réforme est un moteur de développement humain. Car ce sont des convictions égalitaires et libertaires qui doivent s’imposer aujourd’hui dans la lecture du Coran afin de le dé-subsantialiser, afin qu’il cesse d’être rigidifié. Adopter l’égalité et la liberté de tous les acteurs sexuels est une posture humaniste que le Coran peut dire quand il est lu à travers une perspective critique historique. Par conséquent, accepter l’égalité et la liberté de tous les acteurs sexuels (adultes), ce n’est pas accepter l’impérialisme et la mondialisation. Les valeurs sexuelles de l’égalité et de la liberté sont coraniques en soi, aujourd’hui elles seront coranisables de manière explicite dans la réforme du code pénal.

           

            Conclusion

 

            Le Coran reste une boussole indépassée, une source de guidance pour les Musulmans. C’est en cela que réside sa résilience plurielle: une résilience dans le hadith malgré l’abrogation textuelle du verset de la lapidation, une résilience dans le code pénal malgré la sécularisation terminologique, pénale et procédurale.

            L’enjeu est de transformer la résilience coranique en attitude positive, égalitariste et libertaire, pro-sexuelle en un mot. Ce faisant, la constitutionnalisation du Coran comme référence suprême de la nation se mariera parfaitement avec la constitutionnalisation des droits humains. Cette constitutionnalisation antinomique est à dépasser grâce à une approche historique critique des droits humains (également) : ceux-ci sont dé-corrélables d’un Occident capitaliste néolibéral anti-islamique au même titre que le Coran est dé-corrélable d’un refus définitif de la sexualité non-maritale.

 

 

 

[1] Dans ce papier, je ne présente pas les ruptures entre les sanctions coraniques et celles de la Sunna, ce que j’ai dans la présentation de Marseille.

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10 décembre 2021 5 10 /12 /décembre /2021 17:30
A l'occasion de ce 10 décembre, "Journée Internationale des Droits de l'Homme", j'ai le plaisir de mettre à votre disposition mon texte "Les droits humains ne sont pas un objet de foi:
 
" Le « Considérant 5 » du Préambule de la « Déclaration Universelle des Droits de l’Homme » stipule que « les peuples des Nations Unies ont dans la Charte réaffirmé leur foi dans les droits de l’Homme fondamentaux, dans la dignité et la valeur de la personne humaine et dans les droits égaux des hommes et des femmes et qu’ils ont décidé de promouvoir le progrès social et de meilleurs standards de vie dans une liberté plus grande ». A mon avis, l’usage de la notion de foi est compréhensible, comme simple métaphore, de la part des peuples. La foi est ici déconnectée de sa teneur religieuse pour signifier tout simplement une croyance en quelque chose qui n’est pas d’ordre religieux. Cela prête déjà à confusion entre deux registres bien distincts l’un de l’autre. Cela ne peut donc être soutenu par un citoyen soucieux de rigueur conceptuelle.
Car faire des droits de l’homme un objet de foi est un acte qui risque de signifier que les Droits de l’Homme sont un «indémontrable », un postulat qui ne tient que grâce à une foi, sans preuves. Ce faisant, on transforme les droits de l’homme en une sorte de religion civile, universaliste, une religion qui voudrait supplanter et s’installer au-dessus de toutes les autres religions. Cette attitude débouche, dans le cas du Maroc, sur le déraisonnement public, c’est à dire sur la polémique et les tensions, voire sur la violence. Une société démocratique ne peut donc reposer sur le credo de la foi (quelle qu’elle soit), car la foi est plurielle et aucune foi ne peut être considérée comme supérieure aux autres. Pour cette raison, l’universalité des droits de l’homme provient non pas du fait que ceux-ci soient un objet de foi, c’est à dire indémontrables, mais au contraire du fait qu’ils soient démontrables, accessibles à la raison de tous, preuves (empiriques surtout) à l’appui. Leur rationalité s’impose à tout être humain doué de bon sens, cette chose «la mieux partagée du monde ». Il est donc contradictoire d’affirmer que les droits de l’homme sont un objet de foi et de vouloir en même temps promouvoir le raisonnement comme ordre public. La foi, quelle qu’elle soit, empêche le raisonnement de devenir ordre public. Les droits de l’homme ne peuvent être en même temps foi et raison. Ils sont la « Raison » Une et unificatrice opposée à la foi plurielle d’un « Sujet » pluriel.
Il me semble que l’une des tâches imminentes est de promouvoir un raisonnement public marocain en partant du prisme des droits de l’homme. Et ce sur la base des questions suivantes:
1-Dans quelle mesure la constitution, les lois, les pratiques judiciaires respectent-elles la première génération des droits de l’Homme, celle des droits civils et politiques, des citoyen(ne)s marocain(e)s? A titre d’exemple, le droit à la liberté religieuse et à l’égalité des sexes en matière de droits. Quels sont au Maroc les forces et les faiblesses, les opportunités et les obstacles dans le champ de la première génération des droits de l’homme ?
2-Dans quelle mesure la constitution, les lois, les pratiques judiciaires respectent-elles la deuxième génération, celle des droits sociaux et économiques, des citoyen(ne)s marocain(e)s? A titre d’exemple, le droit à l’éducation et à l’emploi, le droit à une couverture sociale… Quels sont au Maroc les forces et les faiblesses, les opportunités et les obstacles dans le champ de la deuxième génération des droits de l’homme ?
3-Dans quelle mesure la constitution, les lois, les pratiques judiciaires respectent-elles la troisième génération, celle des droits sexuels et reproductifs, des citoyen(ne)s marocain(e)s? A titre d’exemple, le droit à une sexualité consentie (quel que soit le statut matrimonial), le droit à une protection contre les IST-VIH-SIDA et contre les grossesses non désirées… Quels sont au Maroc les forces et les faiblesses, les opportunités et les obstacles dans le champ de la troisième génération des droits de l’homme ?
4-Dans quelle mesure la constitution, les lois, les pratiques judiciaires respectent-elles la quatrième génération des Droits de l’Homme, celle des droits environnementaux, des citoyen(ne)s marocain(e)s? A titre d’exemple, le droit à l’eau, le droit à l’assainissement… Quels sont au Maroc les forces et les faiblesses, les opportunités et les obstacles dans le champ de la quatrième génération des droits de l’homme ?
C’est à partir de ces quatre grands questionnements, respectueux du prisme propre des Droits de l’Homme, que l’on peut avoir une vision complète de la réponse marocaine à l’impératif rationnel des Droits de l’Homme, et voir dans quelle mesure la réponse est adéquate ou insuffisante, respectueuse ou non de l’indivisibilité et de l’interdépendance des quatre générations susmentionnées.
A partir de ce constat-diagnostic, il sera alors possible d’élaborer un manuel (adéquat) d’éducation aux droits de l’homme à l’adresse des formateurs censés éduquer la jeunesse en la matière. Un manuel en quatre parties, chacune traitant une génération. Un manuel qui comprendra 20 fiches pédagogiques, cinq pour chaque génération des droits de l’homme, afin d’éviter d’une part la focalisation sur les droits civils et politiques et d’autre part l’occultation de certains autres droits de l’homme dits gênants. Il faut partir du constat que tous les droits de l’homme sont gênants pour tout système politique qui refuse de basculer de manière systémique dans la démocratie. Signalons à ce propos que les droits sexuels et reproductifs, en tant que droits de l'homme, sont ceux qui intéressent plus les jeunes, à partir de 15-16 ans. Ce sont ces droits-là qui ont le plus de chances de rendre les jeunes plus sensibles aux droits de l'homme de manière plus générale, de les motiver et de les mobiliser.
Le Manuel doit permettre aux formateurs de faire voir aux jeunes que les droits de l’homme ont été démontrés par la philosophie et les sciences sociales, qu’ils doivent être tous consacrés par et dans les lois nationales. Et devenir non pas une foi, mais une conviction rationnelle et raisonnable à adopter. Une conviction à défendre avec passion pour pouvoir arriver à un vivre-ensemble dans la dignité de toutes et de tous.
Parmi les droits de l'homme qui permettent un vivre-ensemble digne, le droit à la liberté religieuse. En effet, l'article 18 de la déclaration stipule que l'individu est libre d'avoir et de pratiquer une religion, libre de changer de religion, et libre de n'avoir aucune religion. Et tous les individus sont égaux indépendamment de leur attitude envers la/les religions. C’est cela même qui oblige chaque individu à respecter l’autre ainsi que sa religion ou sa non religion, et qui le préserve de tout dogmatisme et de tout fanatisme. En érigeant la liberté religieuse (dans l’égalité) en droit fondamental, les droits de l'homme sont à la fois libres et respectueux de toute foi, et signent ainsi leur supériorité par rapport à toute religion.
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6 décembre 2021 1 06 /12 /décembre /2021 14:45

 

            Un code pénal non libéré de l’idéologie patriarcale sexiste consacrée par une lecture phallocratique et doctrinaire des textes religieux ne saurait être un code libérateur. D’où la nécessité de réformer ce code afin qu’il soit adapté à l’évolution de la société marocaine du XXIème siècle.  

 

I- Le champ des libertés sexuelles individuelles

 

Sur la base :

- des accumulations de la pensée humaniste moderne qui revendique le droit au plaisir sexuel pour chaque individu, à condition que l’individu soit majeur, consentant, doté d’un savoir scientifique minimal sur la sexualité, conscient des significations de la sexualité et maîtrisant les techniques de protection contre les risques de la grossesse involontaire et des maladies sexuellement transmissibles,

- du principe de la liberté de disposer de son corps en tant que liberté individuelle consacrée par la Charte des droits fondamentaux de l'Homme,

- du principe qu'il n'y a pas de véritable citoyenneté sans droit au plaisir sexuel pour toutes les citoyennes et tous les citoyens,

- de la nécessité d’harmoniser la Constitution et les législations nationales avec les conventions et les traités internationaux,

- de la nécessité de faire en sorte que le code pénal ne soit pas en retard par rapport à la transition sexuelle vécue par la société marocaine, caractérisée par une triple explosion sexuelle, préconjugale, prostitutionnelle et homosexuelle, une explosion qui ne peut pas être niée, une réalité qui ne peut être levée,

Par conséquent, je recommande ce qui suit:

- Abroger l’article 489 qui punit les relations homosexuelles sur la base d’une interprétation controversée de quelques versets coraniques et d’un hadith douteux non cité dans les deux Sihah. Il est temps d'arrêter de considérer les opinions dhahirite (sunnite) et refusioniste (shiite) comme des opinions hérétiques égarées. Il est temps de donner une suite légale à ces opinions qui ne pénalisent pas l'homosexualité en appelant à la mise à mort de l’homosexuel ou à son fouettage, sinon à son blâme et à son exil au minimum. Pourquoi ne pas faire de ces opinions une source de lois islamiques modernes qui acceptent l'homosexualité (de l'intérieur de l'Islam) et qui, en même temps, rejoignent les recommandations des organisations internationales en la matière?

- Abroger l’article 490 qui punit toute relation sexuelle entre un homme célibataire et une femme célibataire (délit de débauche), sans distinguer entre la relation fondée sur le désir et l'amour mutuels et la relation prostitutionnelle. C’est l’article qui sécularise « le crime de la fornication des célibataires » par peur du risque de la confusion entre les liens et les biens et pour préserver l’honneur patriarcal. Ce risque n’est plus de mise aujourd'hui eu égard à la disponibilité de techniques contraceptives modernes efficaces. De plus, lier l'honneur des hommes à la virginité des filles est un indicateur de la prédominance d’un système patriarcal qui institutionnalise la violence à l'égard des femmes, un système qui doit être aboli. Lorsque l’article 490 est supprimé, la prohibition islamique de la sexualité préconjugale devient une conviction purement individuelle qui n’engage que le croyant qui peut la respecter librement sans l’imposer à ses concitoyens en tant que loi. Rappelons ici que le mariage précoce et l’abstinence prémaritale recommandées par les foqaha pour éviter la fornication des célibataires ne sont pas des solutions réalistes et appropriées aujourd'hui. Plus important, la dépénalisation des relations sexuelles préconjugales est un moyen essentiel de prévenir les grossesses non désirées, les avortements clandestins et les différentes formes de violences sexuelles. La suppression de l’article 490 doit s'accompagner de l’institutionnalisation de l’éducation sexuelle dans l'enseignement public à tous ses niveaux.

- Abroger l'article 491 relatif au délit d’adultère (qui sécularise le crime de la fornication du marié/e) et transformer l’adultère en affaire civile hors champ d’intervention de l’Etat (par l'intermédiaire du Ministère public).

- Abroger les articles pénalisant l'avortement : du fait de son analphabétisme en matière de droit musulman, le Marocain lambda ne sait pas que les Shâfi‘ites et les Hanbalites autorisent l'avortement avant que la grossesse n'atteigne les quarante jours (avant que l’embryon ne prenne forme). Il ne sait pas non plus que les Hanafites et les Dhahirites l'autorisent dans les quatre premiers mois de la grossesse, c'est-à-dire avant « l’insufflation de l’âme ». Par conséquent, le consensus fiqhique sur l'interdiction de l’avortement porte sur les grossesses de plus de 5 mois (sauf si la vie de la femme enceinte est en danger). Le Marocain est en droit, en tant que citoyen, de connaître toutes les opinions fiqhiques sunnites (et chiites aussi), mais il n'est pas traité comme un citoyen, mais plutôt comme un être qui devrait être transformé en un musulman malikite, voire en fanatique du malikisme.

D’où la nécessité de travailler sur:

- La libération de l'opinion publique et du code pénal du rite malikite concernant l'interruption volontaire de grossesse,

- Le remplacement des notions d'avortement et d'interruption volontaire de la grossesse par la notion d’« interruption nécessaire de la grossesse» pour des raisons médicales, thérapeutiques ou sociales impérieuses.

- Réformer l’article 160 relatif à la reconnaissance de la paternité dans le Code de la famille: la reconnaissance du géniteur est un acquis important car c'est un document juridique qui prouve que la paternité est reconnue hors mariage «par un acte officiel ou par une déclaration manuscrite non équivoque du géniteur». Cependant, cet article est insuffisant car il s'agit d'une reconnaissance libre et volontaire du père, une reconnaissance non imposée par la loi. La transformation du géniteur biologique en père légal reste un acte volontaire. Il n'existe aucune autorité légale coercitive pour contraindre le géniteur à reconnaître sa paternité et à en supporter toutes les conséquences juridiques. Par conséquent, il faut œuvrer pour permettre à la mère célibataire d'obtenir un test ADN et faire de l'établissement de la filiation paternelle une ordonnance judiciaire obligatoire lorsque la paternité du partenaire sexuel est prouvée. C'est une réforme qui prendra en compte l'intérêt supérieur de l'enfant, car ne pas affilier l'enfant à son géniteur biologique est une violence contre l'enfant et une violation de ses droits fondamentaux au patronyme, à la pension alimentaire et à l'héritage.

- Réformer les articles 484, 485, 486 et 488 : le « Code Pénal » emploie « pudiquement » la notion d’attentat à la pudeur pour incriminer la pénétration anale « exercée indistinctement contre une personne de sexe masculin ou féminin » (articles 484 et 485). Quant au viol, le code pénal le définit comme « l’acte sexuel exercé exclusivement sur une femme contre son gré » (article 486). La défloration de la jeune fille violée est une circonstance aggravante (article 488). N’ayant ni hymen ni vagin, garçons et hommes ne sont pas conçus par le législateur comme susceptibles d’être violés. Ces distinctions entre attentat à la pudeur et viol, entre viol sans défloration et viol avec défloration, entre vagin et anus, montrent toutes que le code pénal marocain défend explicitement des valeurs et des discriminations patriarcales fondées sur le genre. D’où la nécessité de :

            - veiller à définir l’attentat à la pudeur comme une agression sexuelle sans pénétration contre une personne quel que soit le sexe de cette personne ;

            - veiller à définir le viol comme une agression sexuelle avec pénétration vaginale, anale ou buccale contre une personne quel que soit le sexe de cette personne ;

            - veiller à différencier les peines selon le critère de l’âge de la victime : doubler la peine contre l’agresseur sexuel si la victime est mineure, quel que soit le sexe de la victime.

 

II -Le champ des libertés religieuses individuelles

Sur la base de:

- la lecture du texte religieux, qu'il s'agisse du Coran ou de la Sunna, n'est pas l'apanage des seuls foqaha. C'est plutôt un texte qui peut et doit être lu et interprété par d'autres savants tels que les médecins, les sociologues, les économistes, les historiens et les linguistes. Nous avons besoin d’une lecture stratégique de ce texte à partir de différentes perspectives afin de pouvoir le comprendre et l'appliquer de manière appropriée au Maroc d’aujourd’hui.

- la liberté de croyance est expressément stipulée dans le texte coranique (« Pas de contrainte en religion »), et nous devons donc la respecter et la protéger dans la loi et par la loi.

- la question des doctrines reste avant tout une question politique. Quant à refuser complètement la religion, c'est là une revendication plus profonde et plus méritoire qui constitue la véritable bataille. Si nous gagnons la liberté de croyance et de conscience, nous gagnerons la liberté doctrinale. Il est toutefois possible de commencer par la bataille de la liberté doctrinale étant donné qu’elle est une petite bataille même si elle est une bataille fondamentalement politique.

- la conciliation entre les doctrines a été qualifiée de subterfuge/bricolage par les foqaha, mais aujourd'hui nous devons l'appeler « libération doctrinale » et en faire une nouvelle base pour un nouvel ijtihad pour une nouvelle société islamique.

- un pouvoir politique démocratique n'impose pas l'islam à ses citoyens, même si l'islam est la religion d'Etat.

- la liberté religieuse est le seul moyen de garantir une foi sincère et véritable chez l'individu, et c'est cette liberté qui fait que l'Etat traite l'individu comme un adulte responsable de ses choix de vie, en particulier ses choix religieux (ou non religieux).

Par conséquent, je recommande ce qui suit:

- la reconnaissance de la liberté de croyance et de conscience dans la Constitution au lieu d’une simple reconnaissance de la liberté de culte. Je recommande de ne pas criminaliser la conversion religieuse ou doctrinale, voire de ne pas criminaliser l'athéisme. Interroger un citoyen à cause de ses convictions religieuses n'est pas acceptable, c’est une atteinte à l’une de ses libertés fondamentales. La poursuite pénale d’un converti sur la base de l’article 220 n’est pas fondée parce que le converti n'est pas un prosélyte. Il faut donc mettre fin à la pénalisation du prosélytisme et arrêter de considérer l'athéisme comme une maladie, un immoralisme ou une trahison nationale.

- l’abrogation de l’article 222, c’est à dire la dépénalisation de la rupture du jeûne en public pendant le mois de ramadan. En d’autres termes, il faut cesser de considérer le jeûne comme un ordre public pendant le mois de ramadan.

- la pénalisation de tout enseignement religieux qui contredit les acquis scientifiques tels que la théorie de l'évolutionnisme (biologique) et la théorie (physico-astronomique) du Big Bang. Un pouvoir démocratique ne fait pas de l'école publique une usine de production des Musulmans à la chaîne, mais un espace neutre pour enseigner les grandes religions de manière objective, scientifique et neutre. L’école publique doit servir à donner naissance à des citoyens, libres par conséquent.

À tout le moins, le respect de la liberté de croyance exige que la matière « éducation islamique» devienne une matière facultative.

 

III- Le champ de la peine de mort

Sur la base de:

- l’enjeu du passage d'une loi qui fait de la peine de mort une punition et une vengeance à une loi qui plaide pour la réhabilitation et la réinsertion du citoyen selon les principes d’une Shari’a de miséricorde et de tolérance,

Je recommande ce qui suit:

- commencer par un moratoire effectif sur l’application de la peine de mort: moratoire sur le prononcé de la peine de mort, moratoire sur les exécutions,

- transiter vers un moratoire légal: la peine de mort est un choix parmi toutes les peines possibles en cas de crimes graves internationalement reconnus,

- Démultiplier les possibilités de la grâce royale,

- Aboutir in fine à l’abolition de la peine de mort:

            - abolition de la peine de mort dans les affaires politiques et les questions d'opinion et de croyance,

            - abolition de la peine de mort dans les cas de meurtre prémédité (l'État ne tue pas ses citoyens).

 

IV- Sources de mes recommandations

 

- Abdessamad Dialmy : « Apostasie et liberté religieuse au Maroc »,  Le Journal Hebdomadaire, n° 217, 16-22 juillet 2005, pp. 26-28.

- Abdessamad Dialmy : « Pour une école marocaine respectueuse de la liberté de conscience », in Forum Mondial des Droits de l’Homme, Marrakech, Novembre 2014, publié dans mon blog en 2014 puis dans mon livre « La transition sexuelle » en arabe en 2015 puis en français dans mon livre « La fabrique de l’islamisme » en 2016.

- Abdessamad Dialmy : La fabrique de l’islamisme marocain, Casablanca, Editions Toubkal, 2016.

- Abdessamad Dialmy : Transition sexuelle : entre genre et islamisme, Paris, L’Harmattan, 2017.

- Abdessamad Dialmy: “Transitional LGBT in Morocco: LGBT between Islam and human rights”, in “Dynamics of Inclusion and Exclusion in the MENA: Minorities, Subalternity, and Resistance”, “Hanns Seidel Foundation”, Rabat, 2018.

- Abdessamad Dialmy : « Libérer Hajar Rissouni, les femmes avortées et tous les « débauchés », Revue Maroc Hebdo, Septembre 2019.

 

- Abdessamad Dialmy : « La pédophilie structurelle est la plus grave », Telquel, Septembre 2020.

 

- عبد الصمد الديالمي: "سوسيولوجيا الجنسانية العربية"، بيروت، دار الطليعة، 2008.

- عبد الصمد الديالمي: " الانتقال الجنسي في المغرب: الحق في الجنس، في النسب وفي الإجهاض"، الرباط، دار الأمان، 2015.

- عبد الصمد الديالمي: "سوسيولوجيا الإلحاد في العالم العربي"، منشور في "مؤمنون بلا حدود"، 2016.

- عبد الصمد الديالمي: "نحو إسلام مناهض لعقوبة الإعدام"، محاضرة في ندوة "عقوبة الإعدام والشريعة الإسلامية“، تنظيم "المنتدى العالمي لمناهضة عقوبة الإعدام" و "المنظمة الدولية للإصلاح الجنائي"، أسلو، 23 يونيو 2016.

- عبد الصمد الديالمي: "الحريات الدينية في المغرب"، منشور في موقع "مؤمنون بلا حدود"، يناير 2020.

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3 décembre 2021 5 03 /12 /décembre /2021 12:10

 

Abdessamad Dialmy

 

Recommandations pour un code pénal libérateur 2

 

Addendum

 

        

         Pour respecter le délai qui m’a été proposé par l’OMDH, j’ai élaboré mes recommandations « Pour un code pénal libérateur » en toute hâte.

         La nuit précédente (celle du 2 décembre), lors de l’un de mes fréquents réveils insomniaques, je me suis rappelé l’analyse que j’avais faite de la pédophilie dans mon article sur le viol d’Adnane, « La pédophilie structurelle est la plus grave… » (publié en 2020). Analyse que j’avais oublié d’intégrer dans la première version de mes recommandations au ministère de la justice et au parlement, via l’OMDH, au sujet de la réforme du code pénal.

         En effet, dans cet article sur la pédophilie, j’avais précisé que l’auteur de l’agression sexuelle contre Adnane est également poursuivi pour attentat à la pudeur. Et j’avais analysé l’attentat à la pudeur comme une métaphore que le « Code Pénal » marocain emploie « pudiquement » pour incriminer la pénétration anale « exercée indistinctement contre une personne de sexe masculin ou féminin » (articles 484 et 485). Quant au viol, le code pénal le définit comme « l’acte sexuel exercé exclusivement sur une femme contre son gré » (article 486). La défloration de la jeune fille violée est une circonstance aggravante (article 488). N’ayant ni hymen ni vagin, le garçon et l’homme ne sauraient donc être violés selon le code pénal (et encore moins déflorés).   

         Les distinctions entre attentat à la pudeur et viol d’une part, entre viol sans défloration et viol avec défloration d’autre part, montrent que le code pénal marocain défend explicitement des valeurs et des discriminations patriarcales fondées sur le genre.

         Trois recommandations découlent de ce constat analytique:

         1- veiller à définir l’attentat à la pudeur comme toute agression sexuelle sans pénétration contre toute personne quel que soit son sexe ;

         2- veiller à définir le viol comme toute agression sexuelle avec pénétration (vaginale, anale) contre toute personne quel que soit son sexe ;

         3- veiller à différencier les peines selon le critère de l’âge de la victime : doubler la peine contre l’agresseur sexuel si la victime est mineure, quel que soit le sexe de la victime.

         Ces trois recommandations imposent de réformer les articles 484, 485, 486 et 488 du code pénal afin de le libérer de son idéologie patriarcale sexiste. Un code pénal non libéré de cette idéologie ne saurait être libérateur.

                 

                 

 

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28 novembre 2021 7 28 /11 /novembre /2021 11:56

د. عبد الصمد الديالمي

عالم اجتماع

 

توصيات من أجل قانون جنائي تحريري

 

 

1- في الحريات الفردية الجنسية

 

بناء على:

 

- تراكمات الفكر الإنساني الحداثي الذي ينادي بحق كل فرد في المتعة الجنسية شريطة أن يكون الفرد راشدا وراضيا وعارفا بالجنس ومدركا لمعانيه وملما بتقنيات الحماية من خطري الحمل غير المرغوب فيه والأمراض المنقولة جنسيا،

-  مبدأ حرية التصرف في الجسد كحرية فردية ينص عليها ميثاق حقوق الإنسان الأساسية،

- مبدأ أنه لا مواطنة حقة دون حق في المتعة الجنسية لكل المواطنات والمواطنين،

- ضرورة تحقيق الملائمة بين المعاهدات الدولية والدستور والتشريعات الوطنية،

- ضرورة جعل القانون الجنائي لا يتخلف على الانتقال الجنسي الذي يعيشه المجتمع المغربي والذي يتميز بانفجار جنسي ثلاثي، قبل زوجي، بغائي ومثلي، وهو الانفجار الذي لا يمكن إنكاره كواقع لا يُرفَع،

 

نوصي بما يلي فيما يتعلق بإصلاح القانون الجنائي:

 

- حذف الفصل 489 الذي يجرم العلاقة الجنسية المثلية والذي ينبني على تأويل قابل للنقاش لآيات قرآنية وعلى حديث غير وارد في الصحيحين. آن الأوان للتوقف عن اعتبار آراء الظاهرية (مذهب سني) والرافضة (مذهب شيعي) من المثلية الجنسية بدعة وضلالة، آن الأوان لإعطاء مصير قانوني لهذه الآراء التي تبرئ الجنسمثلي والتي لا تقول بحده أو بتعزيره. لماذا لا نجعل من تلك الآراء مصدرا لقوانين إسلامية حداثية تقبل المثلية (من داخل الإسلام) وتلتقي في الوقت ذاته مع توصيات المنظمات الدولية؟

 

- حذف الفصل 490 الذي يجرم كل علاقة جنسية (جنحة فساد) بين رجل وامرأة عازبين مع الخلط بين العلاقة القائمة على الرغبة المتبادلة والحب وبين العلاقة البغائية، وهو الفصل الذي يُعَلمِنُ تحريم "زنا غير المحصن" خوفا من خطر اختلاط الانساب والأموال وحفاظا على الشرف والعرض. إنه خطر لم يعد قائما اليوم بالنظر إلى توفر تقنيات حديثة لمنع الحمل. ثم إن ارتباط الشرف بالعذرية مؤشر على سيادة نظام بطريركي يمأسس العنف ضد النساء، وهو النظام الذي يجب حذفه. عند حذف الفصل المذكور، يصبح التحريم الفقهي للجنس قبل الزواج قناعة فردية محضة لا تطال التقنين مع التذكير على أن الزواج المبكر والإمساك الجنسي قبل الزواج ليسا بحلين واقعيين وملائمين اليوم. إن إباحة العلاقة الجنسية قبل الزواج وسيلة أساسية للوقاية من الحمل غير المقصود ومن الإجهاض السري ومن العنف الجنسي بكل أشكاله. وينبغي أن يصاحب حذف الفصل 490 مأسسة تربية جنسية شاملة في التعليم العمومي بكل أشكاله ومستوياته.

 

- حذف الفصل 491 من المجرم للخيانة الزوجية (المُعَلْمِن لزنا المُحْصَن) وتحويل الخيانة الزوجية إلى قضية مدنية لا دخل للدولة (عبر النيابة العامة) فيها.

 

- حذف الفصول المتعلقة بتجريم الإجهاض: نتيجة لأميته الفقهية، لا يعرف المواطن المغربي "العادي" أن الشافعية والحنابلة يجيزون الإجهاض (الإسقاط) قبل بلوغ الحمل أربعين يوما (يباح ما لم يتخلق). ولا يعرف أيضا أن الحنفية والظاهرية يبيحونه في الشهور الأربعة الأولى من الحمل، أي قبل "نفخ الروح". أما الإجماع على تحريم الإسقاط، فيتعلق بالحمل ابتداء من الشهر الخامس (ما عدا إذا خيف على حياة المرأة الحامل). إن من حق المغربي كمواطن أن يعرف كل الآراء الفقهية السنية (والشيعية أيضا)، لكنه لا يعامل كمواطن وإنما ككائن ينبغي تحويله إلى مسلم مالكي متعصب للمالكية.

         لذا، يتوجب العمل على:

         - تحرير الرأي العام والقانون الجنائي من المنظور المالكي في موضوع الإيقاف الإرادي للحمل

         - تعويض مفهومي الإجهاض والإيقاف الإرادي للحمل بمفهوم "الإيقاف الضروري للحمل" لأسباب طبية، علاجية أو اجتماعية قاهرة.

 

- إصلاح الفصل 160 الخاص بالاستلحاق في مدونة الأسرة: الاستلحاق مكسب مهم لكونه وثيقة قانونية تثبت إقرار الأبوة خارج الزواج "بإشهاد رسمي أو بخط المُقِرِّ الذي لا شك فيه". ما يطبع الاستلحاق من نقص أنه اعتراف حر اختياري من طرف الوالد، اعتراف لا يجبره القانون على الإدلاء به، فتحول الوالد البيولوجي إلى أب قانوني فعل اختياري سيادي. لا وجود لسلطة قانونية قهرية تجبر الوالد على الإقرار بأبوته وعلى تحمل كل التبعات القانونية ذلك. من ثم، العمل على تمكين الأم العازب من حق الحصول على اختبار الحمض النووي وعلى جعل الاستلحاق أمرا قضائيا إجباريا عند ثبوت والدية الشريك الجنسي. وهو إصلاح سيراعي مصلحة الطفل العليا، فعدم ربط الطفل بوالده البيولوجي عنف ضد الطفل وخرق لحقوقه الأساسية من نسب ونفقة وإرث.

 

 

2- في الحريات الفردية الدينية

 

بناء على أن:

 

- قراءة النص الديني سواء كان قرءانا أو سنة ليست حكرا على الفقهاء وحدهم، بل هو نص قابل للقراءة والتأويل من طرف العلماء الآخرين مثل علماء الاجتماع والاقتصاد والتاريخ واللغة، فنحن في حاجة استراتيجية لقراءاته من جوانب متعددة حتى يتسنى لنا فهمه وتطبيقه بشكل ملائم.

 

- حرية العقيدة منصوص عليها صراحة في النص القرآني وبالتالي علينا أن نحترمها وأن نحميها في القانون وبالقانون.

 

- مسألة المذاهب تبقى مسألة سياسية بالأساس، أما أن نرفض الدين كلية فهذا مطلب أعمق وأجدر، لكنه يشكل المعركة الحقيقية لأننا إذا ربحنا حرية العقيدة سنربح حرية التمذهب، ويمكن أن نبدأ بحرية التمذهب على اعتبارها معركة صغرى ولو أنها معركة سياسية بالأساس.

 

- التوليف بين المذاهب سمي تلفيقا من طرف الفقهاء المتمذهبين، وعلينا اليوم أن نسميه تحررا مذهبيا وأن نجعل منه "قاعدة جديدة لاجتهاد جديد في مجتمع إسلامي جديد"،

 

ـ السلطة السياسية الديمقراطية لا تفرض الإسلام على مواطنيها ولو كان الإسلام دين الدولة،

 

- الحرية الدينية هي الكفيلة لوحدها بضمان إيمان صادق وحقيقي لدى الفرد، وهي التي تجعل الدولة تتعامل مع الفرد كإنسان راشد يتحمل مسؤولية اختياراته الحياتية، وعلى رأسها اختياراته الدينية.

 

 

نوصي بما يلي فيما يتعلق بإصلاح القانون الجنائي:

 

ـ الإقرار بحرية العقيدة والضمير في الدستور عوض الاكتفاء بالإقرار بحرية العبادات: عدم تجريم التحول الديني أو المذهبي، عدم تجريم التبشير، عدم تجريم الإلحاد: ذلك أن استنطاق المواطن بسبب معتقداته الدينية شيئا غير مقبول، كما أن متابعة المتحول الديني باسم الفصل 220 أمر لا يستقيم قانونيا لأن المتحول ليس مبشرا، بل ينبغي الانتهاء من تجريم التبشير نفسه والانتهاء من اعتبار الإلحاد (وكل أشكال "الردة") مرضا أو جريمة أو خيانة وطنية.

 

- حذف الفصل 222 والتوقف عن تجريم الإفطار العلني خلال شهر رمضان، أي عدم اعتبار الصيام نظاما عموميا في شهر رمضان

 

- تجريم كل تعليم ديني يناقض مكتسبات العلوم مثل نظرية التطورالبيولوجية  ونظرية الانفجار الأكبرالفيزيائية ـ الفلكية...): السلطة السياسية الديمقراطية لا تجعل من المدرسة العمومية مصنعا لإنتاج مسلمين، وإنما فضاء محايدا لتدريس الأديان الرئيسية بشكل علمي موضوعي محايد، فالمدرسة العمومية مجال لصناعة المواطن الحر. وعلى أقل تقدير، يقتضي احترام حرية العقيدة أن تصير مادة "التربية الإسلامية" مادة اختيارية.

 

 

3- في عقوبة الإعدام

 

بناء على

- رهان الانتقال من قانون يقول بالإعدام العقابي الانتقامي إلى قانون يقول بإعادة التأهيل والإدماج وفقا لشريعة رحيمة سمحاء،

 

نوصي بما يلي فيما يتعلق بإصلاح القانون الجنائي: 

 

-البدء بتجميد فعلي لعقوبة الإعدام : تجميد النطق بالحكم بالإعدام، تجميد التنفيذ،

-الانتقال إلى تجميد قانوني: الإعدام اختيار من بين الأحكام الممكنة في حالة الجرائم الخطيرة المتفق عليها دوليا،

- الإكثار من إمكانيات العفو

ـ الانتهاء إلى إلغاء عقوبة الإعدام :

- إلغاء الحكم بالإعدام في القضايا السياسية وقضايا الرأي والاعتقاد

- إلغاء الحكم بالإعدام في حالة القتل العمد: الدولة لا تقتل مواطنيها

 

4ـ مصادر التوصيات

 

- عبد الصمد الديالمي: "سوسيولوجيا الجنسانية العربية"، بيروت، دار الطليعة، 2008.

- عبد الصمد الديالمي: " الانتقال الجنسي في المغرب: الحق في الجنس، في النسب وفي الإجهاض"، الرباط، دار الأمان، 2015.

- عبد الصمد الديالمي: "سوسيولوجيا الإلحاد في العالم العربي"، منشور في "مؤمنون بلا حدود"، 2016.

- عبد الصمد الديالمي: "نحو إسلام مناهض لعقوبة الإعدام"، محاضرة في ندوة "عقوبة الإعدام والشريعة الإسلامية“، تنظيم "المنتدى العالمي لمناهضة عقوبة الإعدام" و "المنظمة الدولية للإصلاح الجنائي"، أسلو، 23 يونيو 2016.

- عبد الصمد الديالمي: "الحريات الدينية في المغرب"، منشور في موقع "مؤمنون بلا حدود"، يناير 2020.

 

- Abdessamad Dialmy : « Apostasie et liberté religieuse au Maroc »,  Le Journal Hebdomadaire, n° 217, 16-22 juillet 2005, pp. 26-28.

- Abdessamad Dialmy : « Pour une école marocaine respectueuse de la liberté de conscience », in Forum Mondial des Droits de l’Homme, Marrakech, Novembre 2014, publié dans mon blog en 2014 puis dans mon livre « La transition sexuelle » en arabe en 2015 puis en français dans mon livre « La fabrique de l’islamisme » en 2016.

- Abdessamad Dialmy : La fabrique de l’islamisme marocain, Casablanca, Editions Toubkal, 2016.

- Abdessamad Dialmy : Transition sexuelle : entre genre et islamisme, Paris, L’Harmattan, 2017.

- Abdessamad Dialmy: “Transitional LGBT in Morocco: LGBT between Islam and human rights”, in “Dynamics of Inclusion and Exclusion in the MENA: Minorities, Subalternity, and Resistance”, “Hanns Seidel Foundation”, Rabat, 2018.

- Abdessamad Dialmy : « Libérer Hajar Rissouni, les femmes avortées et tous les « débauchés », Revue Maroc Hebdo, Septembre 2019.

 

 

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24 septembre 2021 5 24 /09 /septembre /2021 23:35

 

            Suite à la violence sexuelle subie récemment par une jeune fille à Tanger, voici quelques idées que j’ai déjà émises au sujet de la violence sexiste et sexuelle et que je reprends ici avec quelques autres précisions et propositions.

            La violence sexuelle subie par la jeune fille en question n’est pas un harcèlement sexuel, mais plutôt un abus sexuel, voire un attentat à la pudeur ou une atteinte à la pudeur publique. Et il faut également rappeler que les agences des Nations-Unies comme l’OMS, le FNUAP et le HCR énumèrent différentes formes de violences sexuelles à l’égard des femmes, allant de la moins grave, le harcèlement en l’occurrence, à la plus grave, le viol, en passant par l’abus sexuel. D’autres violences sont également identifiées comme l’exploitation sexuelle, les tortures sexuelles comme arme de guerre…

           

            Le harcèlement sexuel dans la rue est-il justiciable ?

 

            Certes, la vidéo Tanger a choqué l’opinion publique, mais ce genre de violences sexuelles se répète sans constituer un phénomène statistiquement fréquent et significatif. La dernière enquête du HCP révèle en effet que le pourcentage des violences sexuelles à l’égard des femmes reste très faible, une fois comparé à celui des violences psychologiques et physiques. Comme les autres (mé)faits antérieurs du même genre, le (mé)fait sexuel de Tanger est un fait divers amplifié par les réseaux sociaux, et ainsi transformé en fait spectaculaire, en spectacle donné à un voyeurisme national qui ne dit pas son nom.

            Pour revenir au harcèlement sexuel de manière précise, il faut rappeler que le « Code pénal » marocain pénalise le harcèlement sexuel en milieu professionnel depuis 2003. Ce harcèlement est appelé également sextorsion dans le sens où il s’agit d’extorquer à la « victime » une faveur sexuelle contre une faveur professionnelle, voire contre un droit qu’on refuse d’accorder la « victime » à moins que celle-ci n’accorde une faveur sexuelle.

            Quant à la loi 103-13 de 2018, elle va plus loin en pénalisant le harcèlement sexuel dans l’espace public/rue. Cependant, cette loi définit le harcèlement sexuel comme un fait répétitif, un fait répété par la même personne contre une même personne. C’est la répétition qui définit ici le harcèlement comme délit permettant de poursuivre l’harceleur en justice afin de le condamner à une peine de prison. Pour le moment, il est nécessaire de réaliser une étude évaluative objective (non gouvernementale) de la mise en oeuvre de la loi 103-13 pour voir dans quelle mesure le harcèlement est déclaré, poursuivi et puni. D’où les questions suivantes : la loi103-13 a-t-elle été budgétisée ? Quel est le degré de son application ? Et quel est l’indice de son impact sur la réduction des violences sexistes et sexuelles,  le harcèlement entre autres, telle que la loi le définit ? La loi 103-13 a-t-elle un effet dissuasif sur d’autres formes de harcèlement sexuel ?  

            En effet, la définition du harcèlement sexuel par la loi 103-13 ne peut pas prétendre à l’exhaustivité dans la mesure où le harcèlement sexuel dépasse largement la définition que cette loi retient. En effet, qu’en est-il du harcèlement exercé une seule fois contre une femme par un homme H , mais qui est répété sous la même forme ou sous d’autres formes par plusieurs autres hommes V, W, Y, X, Z… que ladite femme croise le même jour ? Il est évident que la loi 103-13 ne permet pas à cette femme de déposer une plainte pour harcèlement contre tous les hommes croisés dans la rue et qui lui ont lancé un regard insistant, un compliment, une invitation, un sifflement ou une insulte… C’est ce harcèlement masculin continu qui constitue un phénomène social majeur significatif et psychologiquement pesant (sur les femmes). Peut-on poursuivre en justice un homme qui adresse une parole, une invitation, une insulte à plusieurs femmes qu’il croise lors de sa journée ? Comment rendre ce phénomène lourd justiciable ? Est-il possible d’en établir une définition juridique et de le pénaliser ? Et d’abord comment l’établir ?

           

            De la drague libératoire au harcèlement répressif

 

            Pour comprendre le phénomène du harcèlement sexuel à la fois unique (de la part d’un seul homme) et répétitif (répliqué par plusieurs autres hommes), je propose d’abord de distinguer sociologiquement entre la « drague » et le « harcèlement » même si les deux phénomènes renvoient à une mixité sexuelle non encore vraiment banalisée et qui conduit par conséquent les hommes à ne voir dans les femmes dans la rue que des proies sexuelles, des corps, des corps apparemment à portée de la main.

            Dans les années 1960-1970, l’espace extérieur (à la maison) a cessé d’être exclusivement masculin. Il est devenu un espace public partagé par les hommes et les femmes grâce à la scolarisation des garçons et des filles et grâce à l’accès des femmes au marché de l’emploi. Cette sortie structurelle des femmes dans l’espace public/rue s’est accompagnée d’un dévoilement considéré comme plus adapté au développement. C’était là un phénomène nouveau dans un pays musulman habitué à ne permettre aux femmes la consommation restreinte de l’espace extérieur/public/masculin que sous la condition d’être voilées (jellaba, niqab, haïk). Une fois dévoilées (en robe, mini-jupe, short, tailleur…),  une fois étrangères dans un espace urbain détribalisé, les femmes sont devenues un objet de drague/chasse. Leur présence dans cet espace était inédite. La drague exprime alors le fait que leur présence n’est pas banale, survenue rapidement sans une transformation des structures sociales et des mentalités. Dans le contexte de cette mixité nouvelle, la drague devient un mode de rencontre des deux sexes, un mode nouveau qui institue de nouveaux codes de conduite entre les femmes et les hommes. Les hommes exerçaient leur pouvoir de séduction par la parole, l’habit, la voiture…, les femmes y trouvaient une reconnaissance de leur beauté et une occasion d’éprouver leur « vertu » et leur désir à la fois. La plupart des femmes étaient mêmes gênées de ne pas être draguées dans la rue. Etre draguée était pour la femme un compliment en soi, un signe de succès. Personne ne s’en plaignait. La « chasse » (Ciyada) à la femme dans la rue était une réaction masculine socialement normalisée. Et les femmes elles-mêmes avaient également leurs moyens propres de draguer, plus subtiles...

            Dans ces années 1960-70, on considérait la « drague » plutôt comme un signe de libération sexuelle, Le féminisme partisan le plus avancé de l’époque, celui de l’USFP dans son « Rapport idéologique » (1974), n’y prêtait aucune attention. Le rapport était cependant révolutionnaire dans la mesure où, pour la première fois dans l’histoire du Maroc, un parti politique revendiquait l’égalité totale entre les hommes et les femmes au niveau du « Code du Statut Personnel » (y compris dans l’héritage).

             Dans les années 1990, on passe d’une culture quasi-normalisée de la drague (induite par une mixité rapide non banalisée) à une culture agressive du harcèlement. Et c’est sous la pression du féminisme international que le féminisme marocain a commencé à condamner le harcèlement sexuel comme une agression, comme une forme de violence sexiste et sexuelle à combattre. Auparavant, l’analyse sociologique avait déjà démontré que la drague était plutôt une chasse patriarcale à la femme à des fins hédonistes/érotiques. Elle avait également démontré aussi que si le harcèlement sexuel représente toujours une chasse patriarcale, cette chasse est différente : son objectif n’est plus l’hédonisme sexuel, mais l’invisibilisation ou l’exclusion totale des femmes de l’espace public. Là il s’agit de de chasser les femmes de l’espace public au nom d’un islamisme dont la stratégie est de dés-érotiser l’espace public suite à une frustration sexuelle grandissante (comme je l’ai établi dans mon livre Logement, sexualité et islam, EDDIF, 1995, remanié et réédité sous le titre Ville, sexualité et islamisme, IMPR, 2018). L’islamisme frériste/makhzénisé se contentera alors de demander aux femmes de se re-voiler pour qu’elles ne soient plus perçues comme corps désirables semeurs de fitna. Quant à l’islamisme radical, il va plus loin et exige que les femmes portent la burqa ou quittent définitivement l’espace public et rentrent dans les foyers afin que cesse tout risque de tentation sexuelle dû à la mixité.

            Cette volonté islamiste de dés-érotisation, entendue comme « purification sexuelle » de l’espace public, se retrouve de manière informe chez les jeunes issus des milieux populaires. En d’autres termes, ces jeunes sont frustrés face aux femmes, face à ces corps à la fois excitants et inaccessibles, et leur demandent alors de se couvrir ou de rentrer dans les maisons. Ils considèrent les femmes non-voilées comme des provocatrices sexuelles, comme les « agresseurs » véritables. Ce raisonnement islamiste spontané sans engagement islamiste formel, pousse les jeunes à faire preuve de masculinité et d’islam en corrigeant les femmes, en leur rappelant qu’elles sont des femelles avant tout, des corps à voiler. La femme «rebelle » qui refuse de se voiler devient un objet de violences sexuelles, principalement du harcèlement unique/répétitif. C’est donc une masculinité dépourvue de ses pouvoirs et de ses privilèges patriarcaux qui veut reprendre le contrôle traditionnel de l’espace public, des femmes et de leur corps, mais en usant d’un instrument nouveau, celui du harcèlement sexuel. C’est là le seul moyen qui reste aux jeunes qui n’ont pas les moyens d’accéder au plaisir sexuel.

            Cet état des lieux trahit l’injustice sexuelle régnante. En effet, la sexualité est permise aux seuls gens mariés (au niveau du droit), et pratiquement réservée aux jeunes des classes sociales favorisées qui en ont les moyens (au niveau des faits). Et du coup, la négation des droits et des libertés sexuels, renforcée par des obstacles financiers et logistiques, devient corrélée aux violences sexistes et sexuelles. Harcèlement, abus, viol… deviennent les moyens d’obtenir une gratification sexuelle illusoire au détriment des femmes, au nom d’une foi naïve qui donne au violenteur la certitude d’être dans le vrai et dans le juste.

           

            De la nécessité d’une réforme sexuelle

 

            Une loi ne suffira donc pas pour endiguer le harcèlement sexuel islamiste, ce harcèlement traduisant un besoin social et sexuel profond, individuel et collectif. La sanction pénale n’effacera pas le besoin. L’enjeu est donc de réaliser une réforme sexuelle.

            D’abord en montrant que les causes de la prohibition islamique de la sexualité préconjugale sont aujourd’hui caduques. Les contraceptifs modernes permettent d’éviter les grossesses hors-mariage qui, selon les foqaha, risquent de semer la confusion des liens et des biens. L’abstinence sexuelle préconjugale ne peut plus être considérée aujourd’hui comme un contraceptif adéquat et réaliste.

            La réforme sexuelle doit se continuer par l’abrogation des articles 489, 490 et 491 du code pénal. C’est une revendication que j’ai exprimée en 2007 et que j’ai toujours défendue depuis dans mes différents écrits. Il m’a fallu attendre 2019 pour voir un seul parlementaire (de gauche) la reprendre et la défendre, sans succès bien entendu (jusqu’à présent).

            Ensuite en instituant l’éducation sexuelle à l’école, une éducation sexuelle compréhensive qui est à la fois savoir sexuel scientifique et morale sexuelle anti-patriarcale qui valorise la sexualité en soi. Cette éducation est nécessaire pour habiliter les jeunes à couper avec la pornographie, celle-ci étant leur maître sexuel comme je l’ai montré depuis 1997-2000 dans mon livre « Jeunesse, Sida et Islam ». Cependant, pour que l’institution de l’éducation sexuelle soit efficiente, il faut commencer par la donner aux éducateurs eux-mêmes, sinon sa transmission correcte ne sera pas assurée. Il faut la donner aux parents, aux enseignants, aux soignants, aux artistes et aux journalistes. Ces éducateurs doivent tous être convaincus que le droit à la sexualité est une condition de bien-être individuel et collectif. S’ils ne le sont pas, ils ne pourraient rien transmettre de sexuellement sain.

            Enfin en travaillant sur la masculinité, sur les hommes, avec les hommes. La question sexuelle ne peut pas être résolue tant que les hommes restent prisonniers du caractère pseudo-naturel et pseudo-sacré de leurs pouvoirs et privilèges. Une masculinité nouvelle est à construire, une masculinité qui reconnaît et qui respecte les droits sexuels et reproductifs des femmes en tant que droits humains universels. Une masculinité marocaine qui va dans ce sens commence à éclore comme je l’ai montré dans mon livre « Vers une nouvelle masculinité au Maroc » (2000).

            Réforme juridique, éducation sexuelle et déconstruction-reconstruction de la masculinité doivent constituer les axes majeurs d’une politique sexuelle publique qui fait du plaisir sexuel des Marocains et des Marocaines son objectif stratégique, le plaisir sexuel étant une condition de base de tout développement individuel et social. Une société sexuellement frustrée et violente ne peut pas se développer. Une politique sexuelle positive ne peut pas s’arrêter aux niveaux de l’interdiction de la sexualité préconjugale et des homosexualités, de l’espacement des naissances ou de prévention des IST-VIH/SIDA. Elle ne doit pas non plus faire de la sexualité un moteur informel du tourisme national.

            L’établissement de cette politique sexuelle telle que je la définis ici se heurte à deux écueils majeurs.

            Le premier est d’ordre international : il n’existe pas de conventions ou de traités internationaux (qui reconnaissent les droits sexuels comme des droits humains) à signer et à ratifier par les Etats-Nations, et qui obligent ces Etats à y adapter leurs législations nationales. Il existe tout au plus des recommandations dans ce sens dans les plans d’action des conférences du Caire (1984) et de Pékin (1995). Il existe également des résolutions du « Conseil des Droits de l’Homme » (ONU/Genève) qui parlent des droits sexuels comme droits humains et qui invitent aux non-discriminations sexuelles et de genre. Mais ni les recommandations ni les résolutions ne sont légalement contraignantes. Chaque Etat-nation reste souverain en matière de politique sexuelle.

            Le deuxième est d’ordre national : les politiques sexuelles qui prônent la liberté et les droits sexuels (des femmes surtout) sont à l’origine des politiques qui émanent de la gauche et des gouvernements socialistes. Au Maroc, il faudrait en principe attendre qu’un parti de gauche prenne le pouvoir pour qu’il y ait une chance d’aller vers une réforme sexuelle. La réforme de la Moudawwana en a été un bel exemple. Ce processus a commencé en 1974 dans le « Rapport idéologique » de l’USFP (un parti de la gauche), processus qui a été repris principalement par les associations UAF, ADFM et Joussour, toutes issues de la gauche, et c’est le gouvernement socialiste d’alternance (1998-2002) qui a politisé la question féministe et qui a conduit à l’arbitrage royal. On peut même émettre l’hypothèse que l’éviction du gouvernement d’alternance en 2002 malgré la victoire de l’USFP aux élections législatives de 2002 exprime une volonté inavouée de ne pas faire de la réforme de la Moudawwana en 2003-2004 une victoire/conquête anti-islamiste de la gauche. Pour preuve, l’exemple de la polémique autour de l’avortement. La légalisation de l’avortement, supportée par la seule société civile, a eu certes les faveurs d’une commission royale, mais elle n’a pas encore eu sa traduction dans le code pénal. A l’évidence, il faut donc attendre qu’un gouvernement dirigé par une gauche forte politise la question sexuelle pour espérer un arbitrage royal qui va dans le sens d’une réforme sexuelle au service des droits et libertés sexuels.

            En un mot, la réforme du code pénal dans un sens sexuellement antirépressif ne doit pas rester une revendication conjoncturelle brandie par la société civile à chaque violence sexuelle médiatisée comme furent le cas du « viol du bus » (2017), des mini-jupes d’Agadir (2018), du viol d’Adnan (2020) et de la jeune fille qui a été dénudée à Tanger dans la rue (2021)… Elle ne doit pas non plus être évoquée dans les seuls cas de « débauche » (dans le sens de l’article 490) ou d’avortement médiatisés (ceux de l’affaire de Hajar Raissouni). La réforme du code pénal doit être une revendication structurelle inscrite dans un agenda politique.

            En d’autres termes, la politique sexuelle publique positive est une demande qui est loin d’être l’objet d’un consensus national. Au contraire, elle divise, elle est une ligne de démarcation entre la gauche et la droite. Par définition, elle reste une demande politique de fond inscrite dans l’ADN de tout parti politique qui se définit comme de gauche. Des considérations malheureuses de calcul électoral conduisent malheureusement les grands partis de gauche à refouler dans leur inconscient électoral la revendication des libertés et des droits sexuels. C’est ce que je ne cesse de déplorer depuis des années. Après les élections du 8 septembre 2008 qui ont vu tous les partis politique de gauche basculer dans une opposition minoritaire malgré leur attitude politique « sexuellement correcte », il est temps pour eux d’assumer la question sexuelle et de genre comme leur propre devoir politique. Ils n’ont plus rien à perdre pour le moment !

           

            Conclusion

           

            En attendant la libération sexuelle, Société et Etat ont tous deux imposé une libéralisation sexuelle de fait, au niveau des pratiques sexuelles. L’explosion libérale des sexualités pré-conjugale, homosexuelle et prostitutionnelle ne peut pas être stoppée par des lois étatiques dépassées. Ces lois y concourent au contraire. L’ampleur de l’explosion sexuelle est l’indicateur d’une transition sexuelle en gestation (voir mes deux livres sur ma théorie de la transition sexuelle (en 2015 en arabe et en 2017 en français). L’accouchement risque d’être plus long, dystocique aujourd’hui, à cause de la dominance confirmée des libéraux (au détriment des libertaires), mais le « travail » a commencé au niveau de la société civile féministe et au niveau du PSU et de l’Alliance de la Fédération démocratique, ces partis libertaires plutôt gauchistes. Aujourd’hui, ce travail est à assumer de manière structurelle par tous les partis de la gauche marocaine.    

 

 

 

 

 

 

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9 octobre 2020 5 09 /10 /octobre /2020 12:38

 

      

       اغتُصِب عدنان وقُتل، والداه مكدومان، ساكنة مغربية مصدومة ومستعدة لنهش البيدوفيلي القاتل، ملك مواس يقدم تعازيه لوالدي عدنان، الطفل القتيل الذي لا يتعدى عمره 11 سنة.

       كمواطن، لا يمكن لي إلا أن أضم صوتي لصوت ألوف المغاربة المستنكرين عن حق لجريمة ذلك "التنين الأخلاقي". بدوري لا يسعني إلا أن أدين بشدة ذلك الاغتصاب الشنيع القاتل دون أن أسقط في منطق الانتقام أو في العنف المضاد.

       في هذه الورقة المهداة إلى عدنان، أود التطرق إلى أربعة أسئلة:

       - كيف يكون البيدوفيلي مريضا ومجرما في الوقت ذاته، أي مسؤولا عن جريمته رغم مرضه؟

       - لماذا يكون للمجتمع المغربي رد فعل عنيف وسريع للتنديد ببعض حالات الاغتصاب الظرفية خلافا لتواطؤه مع الأفعال البيدوفيلية البنيوية التي يُطَبِّعها في اشتغاله اليومي؟

       - ما هو دور التربية الجنسية في الوقاية من البيدوفيليا الظرفية ومن البيدوفيليا البنيوية؟

       - لماذا التمييز بين "هتك العرض" و"الاغتصاب" في القانون الجنائي المغربي ولماذا ينبغي حذفه والاحتفاظ فقط بجريمة الاعتصاب؟

 

       البيدوفيليا كواقعة ظرفية، كمختلفات

 

       في منظور الطب العقلي، تشكل البيدوفيليا (حب ممارسة الجنس مع الطفل) مرضا عقليا، وبتعبير أدق بَرَافيليا (paraphilie)، مثلها في ذلك مثل الزووفيليا (الجنس مع الحيوان) والنِكْروفيليا (الجنس مع الموتى). إنها انحراف جنسي يكمن في الانجذاب الجنسي لدى الراشد إلى الطفل، أي إلى "شريك" غير ملائم. وهو انحراف خطير يهدد صحة الطفل (ة) المغتصَب (ة) وسلامته النفسية، بل يقود في بعض الحالات إلى قتله. ومما يجب الإلحاح عليه أن البيدوفيليا اضطراب جنسي مرحلي متقطع، بمعنى أنه يصيب بعض الأفراد في فترات معينة فقط من حياتهم العادية. فالبيدوفيلي شخص عادي له حياة عادية خالية من أي هوس جنسي. لذا لا يمكن توقع الفعل البيدوفيلي حين يقع لأول مرة. وحسب الأطباء العقليين، فإن 33٪ من البيدوفيليين تعرضوا لاعتداءات جنسية أثناء طفولتهم ومعظمهم يشعر بألا قيمة له جراء ذلك، وهو أيضا شعور مرتبط بطفولة شقية بشكل عام قلَّما تساعد على تثمين الذات. وأغلب ضحايا البيدوفيليا الظرفية العنيفة ينحدرون من الأوساط الشعبية حيث تكثر الولادات دون إمكانيات مادية ولوجستية ملائمة، وبالتالي لا يتم تثمين الطفل كفرد بما فيه الكفاية. من ثم تظل حراسة الطفل من طرف الأسر حراسة ناقصة وضعيفة نظرا للعوامل المذكورة ومن ضمنها أيضا إخراجه من المدرسة وقضاء جل أوقاته في الشارع. إن هذا الطفل الهش معرض أكثر من غيره لأن يُغتصَب، خصوصا في المجال الحضري المتوحش أكثر فأكثر، ولأن يصبح فيما بعد بدوره بيدوفيليا يجد في الاغتصاب والقتل المتعة والشعور بالقوة وتثمين  الذات المفتقدين.

       ومما يبين أن البيدوفيليا مرض عقلي كونها سلوك لا إرادي يخضع لآليات نفسية لا شعورية خارجة عن السيطرة، رغم أن الإقدام على الاغتصاب يكون في بعض الحالات مخططا له بدقة. من هنا لا بد من التمييز بين الشخص وبين أفعاله البيدوفيلية لأن تلك الأفعال أفعال ظرفية وقهرية. أمام هذا التمييز بين الشخص والفعل، وبين المرض والجريمة، وهو تمييز نظري يذوب في الفعل البيدوفيلي، يطرح سؤال كبير على الأطباء العقليين وعلى القضاة: ما مدى مسؤولية البيدوفيلي في اغتصاب الأطفال؟ هل هو مريض غير مسؤول عن أفعاله؟ هل هو مجرم يستحق العقاب؟ هل هو مريض مجرم يتموقع في منزلة بين المنزلتين، بين المرض والمسؤولية؟ أين يجب إرساله؟ هل إلى مستشفى الأمراض العقلية قصد علاج نفسي يعيد إدماجه في المجتمع؟ أم إلى المستشفى قصد إخصائه جسديا أو كيميائيا حتى يصبح عاجزا عن العود إلى اغتصاب الأطفال؟ هل يجب تركه حرا ومراقبة ابتعاده عن الأطفال بفضل الوسائل الإلكترونية والرقمية الحديثة؟ وبالنظر إلى كونه غير قابل للعلاج الكلي والنهائي، واحترازا للعود، هل ينبغي سجنه المؤبد؟ أو الحكم عليه بالإعدام في الدول التي لا زالت تحتفظ بعقوبة الإعدام؟ أم الحكم عليه بالإعدام دون تنفيذ العقوبة؟

       إن الأجوبة عن كل هذه التساؤلات تختلف من حالة إلى حالة، ومن دولة إلى دولة حسب اختلاف التشريعات القطرية ودرجة تبعيتها إلى الدين وحسب مستوى تطور المجتمع ونظرته إلى الحياة.

 

 

 

 

       البيدوفيليا كظاهرة اجتماعية بنيوية

 

       بالإضافة إلى البيدوفيليا الظرفية والقاتلة في بعض الحالات، توجد في المغرب أشكال أخرى من البيدوفيليا.

       هناك أولا بيدوفيليا تعويضية تهم أولئك الرجال المغاربة الذين يتخذون الأطفال أهدافا جنسية بالنظر إلى تحريم وتجريم العلاقات الجنسية الحرة والمتراضية بين الكبار. فالرجل المحروم جنسيا يتجه نحو الطفل لأن تغرير الطفل أو تعنيفه أسهل. ويقصد بالخصوص الفتيان، فهؤلاء، بالإضافة إلى وسامتهم الأنثوية، يسهل الاقتراب منهم والحديث إليهم بالمقارنة مع الفتيات. ثم إن مضاجعة الفتيان أقل خطورة اجتماعية من مضاجعة الفتيات، فالغلام "لا يحيض ولا يبيض" (الجاحظ)، بمعنى أنه لا يحمل، ولا غشاء بكارة له يمكن افتضاضه. ومن المعروف أن الثقافة المغربية قد أدمجت هذا النوع من لواط صغار السن في ثنايا تقاليدها. فلا زلنا إلى اليوم نجد من يقول بأن فلانا يحب الأطفال (فْلانْ كيبغي الدراري) دون أدنى حرج بل ومع ابتسامة متفهمة ومتواطئة، مشتركة بين القائل والسامع. فالمغاربة كانوا لا يرون في ذلك شيئا قبيحا أو خطيرا، بل نجد مثلا شعبيا يقول: "لن تتعلم إلا إذا مررت من تحت بطن المعلم" (ما تتعلمْ حتى دُّوزْ مَنْ تحتْ كَرْشْ المْعَلَّمْ). والمقصود بالمعلم هنا إما معلم الحرفة اليدوية وإما الفقيه الذي يسهر على تحفيظ القرآن للأطفال، مستعينا في ذلك بقضيبيه (عصاه وذَكَره)، ومتمتعا بهما معا. إن الاعتداء الجنسي على الأطفال كان ولا يزال إلى حد ما صمام أمان جنسي مندمج في المجتمع المغربي يمَكِّن الرجال من تفريغ مكبوتاتهم الجنسية.

       ثانيا هناك الفتيات الصغيرات اللواتي يتعرضن للاغتصاب دون افتضاض غشاء بكارتهن، وهي على العموم حالات يتقبلها الوالدان ولا يبلغان عنها السلطات المختصة ما دام غشاء البكارة سليما. فهؤلاء الآباء لا يعتبرون ذلك الاعتداء الجنسي اغتصابا ما دامت الفتاة لم تفقد أي شيء في نظرهم. "ما وْقَعْ باسْ"، تلك هي حجتهم لأن الفتاة لم تفقد بكارتها، وبكارتها هي رأسمالها الأساسي (الوحيد في نظرهم) وهي عاصمة جسدها. فما دامت العاصمة لم تسقط، وما دام الرأسمال لم يؤخذ، لا شيء حدث. ما حدث ليس مهما. لا وجود هنا إلى وعي الوالدين بالعواقب الخطيرة للاغتصاب على شخصية الفتاة وعلى توازنها النفسي. لا بد من اعتبار هذا الموقف الوالدي الساذج المتسامح مع الاغتصاب انعكاسا مباشرا لأخلاق ثقافية أبيسية تدافع عن الشرف على حساب صحة الفتاة الجنسية والإنجابية والنفسية. وهي أخلاق تُطَبِّع اجتماعيا السلوك البيدوفيلي.

       ثالثا نجد ظاهرة تزويج الصغيرات لأسباب اقتصادية (فقر الأسرة) أو خوفا من العار (جراء فقدان الفتاة لبكارتها قبل الزواج)، وذلك رغم منع تزويج القاصرات. إنها ظاهرة لا تزال بنيوية في المجتمع المغربي، خصوصا وأن المشرع المغربي يقر بمسطرة ثبوت الزوجية لشرعنة أشكال الزواج غير القانونية. إنها ظاهرة تشجع بدورها انتشار البيدوفيليا وتطبيعها في المجتمع.

       رابعا هناك تواطؤ بعض الآباء والأمهات في بيع خدمات جنسية إلى السواح الأجانب، وهي خدمات يقوم بها طفلهم. بتعبير آخر، يدفع أولئك الأولياء بأطفالهم إلى الدعارة، فيشجعون من هنا الممارسات البيدوفيلية البغائية التي تحقق لهم بعض الدخل. هكذا يصبح الطفل عاملا جنسيا مستغَلا من طرف والديه.  طبعا لا يطرح سؤال موافقة الطفل ورضاه على هذه الممارسات، وسؤال سنه لا يطرح أيضا عند إقدام الطفل على العمل الجنسي الإرادي الطوعي في بعض الأسر.

       وأخيرا تجدر الإشارة إلى الاستغلال الجنسي للخادمات الصغيرات في المنازل من طرف بعض أفراد الأسرة من جهة، وإلى نفس الاستغلال لأطفال الشوارع من طرف مشردين أو زبائن.

       هذا ما يجعلنا نقول بوجود بيدوفيليا بنيوية لها ستة أشكال، والتي يذهب ضحيتها أطفال من كلا الجنسين. وبدورهم ينتمي أولئك الأطفال بالأساس إلى شرائح اجتماعية فقيرة تطبعها الهشاشة في كل تجلياتها، الاقتصادية منها والقيمية.     

       بديهي أن هذه الأشكال الستة تجعل من البيدوفيليا البنيوية ظاهرة اجتماعية قارة، لصيقة بالمجتمع المغربي، واصمة له. فهي مطبَّعة ثقافيا واجتماعيا، بل ومنظمة قانونيا في حالة زواج الصغيرات/القاصرات.

 

       البيدوفيليا البنيوية هي الأخطر

 

       رغم أن أشكال البيدوفيليا البنيوية مزمنة وأكثر ترددا في المجتمع، فإن الصراع ضدها أقل تدوالا في الإعلام وفي المجتمع. فبما أنها ظاهرة اجتماعية شبه عادية تنتمي إلى الحياة اليومية العادية، فهي لا تخرق الروتين اليومي ولا تبلغ بالتالي مستوى البيدوفيليا الظرفية المغتصبة والقاتلة، الانفجارية إعلاميا، و"الفرجوية" إن صح التعبير. فعلا، من الأسهل بالنسبة للعامة التحامل على بيدوفيلي مجرم دون مراعاة مرضه بالمقارنة مع عجز العامة البنيوي عن إدراك البيدوفيليا البنيوية والتنديد بها. لذا يمكن الخلوص إلى أن العامة لا تدين المحتال على عدنان كمغتصب بقدر ما تدينه كقاتل، وذلك لكون اغتصاب طفل لم يكن حدثا استثنائيا خطيرا في المجتمع المغربي. اغتصاب عدنان وآخرين وقتلهم حالات بيدوفيليا ظرفية، وهي مجموعة "حوادث سير" متفرقة تقع بين الفينة والأخرى تؤجج غضب الشارع وهيجانه نظرا لعدم توفرها على تكرارية إحصائية دالة. من ثمة فرجويتها. أما البيدوفيليا البنيوية المزمنة التي لها دلالة سوسيولوجية وإحصائية في الوقت ذاته تشهد على خطورتها الاستراتيجية، فإن العامة لا تراها بل لا تريد أن تراها رغم إنجاز دراسات سوسيولوجية أكاديمية تم تبنيها من طرف جمعيات الدفاع عن حقوق الطفل وتم ترويجها إعلاميا من حين لآخر.

       بالنسبة لعالم الاجتماع، البيدوفيليتان معا خطيرتان لكن البنيوية أخطر من الظرفية، فالبيدوفيليا الظرفية المتفرقة تتعلق بأفراد مرضى فقط وهي من اختصاص الطب العقلي والقضاء، أما البيدوفيليا البنيوية فإنها مرض المجتمع ككل وتؤدي إلى محاكمة المجتمع ككل وإلى ضرورة إصلاح المجتمع ككل. وعليه، إذا كان الرد فعل الشعبي المندد بشدة بالبيدوفيليا القاتلة المؤلمة ردا طبيعيا، فإنه لن ينضج إلا إذا وعى وندد وأدان البيدوفيليا البنيوية التي ينتجها المجتمع المغربي بالجملة ويعيد إنتاجها بالجملة. على ذلك الفعل الشعبي أن يصبح فعلا مواطنا، أن يدرك البيدوفيلي الظرفي كمواطن مريض له حقوق، والطفل كمواطن على قدم المساواة مع الراشد في الحق في الاحترام، والخادمة المنزلية الصغيرة كمواطنة لا خدمة لها قبل الخامسة عشرة ولا استغلال جنسي لجسدها، والفتاة التي اغتصبت دون فقدان بكارتها كمواطنة لها حقوق في العلاج وفي رد الاعتبار، والفتاة القاصرة كمواطنة لا زواج لها قبل الثامنة عشرة، والأب والأم كمواطنين لا حق لهما في استغلال طفلهما في التجارة الجنسية...

 

       التربية الجنسية، تلك الضرورة العمومية، ذلك اللقاح

 

       أمام الظاهرة البيدوفيلية بشقيها الظرفي والبنيوي، تغدو التربية الجنسية مسألة حيوية، وبرنامجا وطنيا عموميا ضروريا. فالمربي نفسه في حاجة إلى تربية لأنه يندد بقوة بفعل بيدوفيلي ظرفي محزن ينتمي إلى "المتفرقات"، لكنه يصمت أمام البيدوفيليا البنيوية التي تنخر المجتمع بأكمله.

       بمناسبة اغتصاب ومقتل عدنان، طالبت بعض الأصوات بإعطاء تربية جنسية للأطفال قصد تأهيلهم لعدم الوقوع في الفخ البيدوفيلي. وهذا مطلب صحيح إلى حد ما إذ لم نفتأ شخصيا منذ 1997 بالقول والكتابة إلى صناع القرار بمناسبة الخبرات التي أنجزناهم لهم أن التربية الجنسية ضرورة عمومية في المغرب قصد الوقاية من العنف الجنسي (الغيري والمثلي ضد الكبار والصغار) ومن العنف الجندري (بأشكاله الجنسية وغير الجنسية) ضد النساء وضد اللاغيريين. لكن هذا لا يعني أن التربية الجنسية يمكن أن تجعل الطفل قادرا على تشخيص بيدوفيلي عنيف وقاتل بشكل مسبق. كل ما يمكن أن توفره التربية الجنسية للطفل هو تزويده ببعض المعلومات الأولية عن جسده وعن الجنس وعن العلاقة الجنسية وتأهيله بالتالي لتشخيص محاولات بيدوفيلية إستدراجية من طرف بيدوفيلي يخفي مقاصده الحقيقية، الجنسية. إنه التأهيل الذي يدفع الطفل إلى تشخيص ورفض كل محاولة بيدوفيلية إغرائية وإخبار والديه بالاستدراج البيدوفيلي الذي يتعرض إليه أو بالاعتداء الجنسي الذي تعرض له لكي يحصل على علاج بعد الصدمة. وفي الوقت ذاته، تؤهل التربية الجنسية الوالدين للتحادث مع أطفالهم عن الجنس بشكل منفتح وصحي خارج محاولات أو حالات البيدوفيليا، قبلها، وبعدها وإبانها.

       لكن ليس للتربية الجنسية أية نجاعة حين يجد الطفل نفسه أمام بيدوفيلي عنيف يختطفه ويسجنه ويغتصبه ويقتله ويدفنه قصد محو كل آثار الواقعة البيدوـ إجرامية. وهي أيضا لا تحصن البيدوفيلي نفسه من الإقدام على الفعل البيدوفيلي ولو تلقى البيدوفيلي تربية جنسية في كل مساره الحياتي (العائلي، المدرسي، الخصوصي والعمومي). ففعله ناتج عن آليات نفسية قاهرة أقوى من التربية، ومن العقل، ومن الأخلاق. فالتربية الجنسية المعطاة في مدارس الدول الغربية المتقدمة لا تمنع البيدوفيلي، ذلك المريض المرحلي المتقطع، من استغلال سذاجة الطفل الذي لا يعرف أي شيء عن الجنس أو من إغراء الطفل للحصول على موافقته (إن كان الطفل يعرف) أو من اغتصاب الطفل في حالة رفض الطفل.

       على العكس من ذلك، للتربية الجنسية مفعول ناجع في الوقاية من أشكال البيدوفيليا البنيوية. فهي أولا تقدم معارف علمية عن الجهاز الجنسي من حيث تشريحه واشتغاله، وعن الجنسانية (sexualité) كنشاط سيكوـ فيزيولوجي، وهي ثانيا تثمن الجنسانية وتبيحها مع  النصح باجتناب الجنسانية المبكرة، وهي ثالثا تشترط أن تكون العلاقة الجنسية كعلاقة اجتماعية علاقة متراضية خالية من كل أشكال العنف ومحمية من كافة الأمراض المنقولة جنسيا، وهي رابعا تدعو إلى رفض اللامساواة بين الرجال والنساء والجندر الثالث في الحقوق الجنسية، وهي خامسا ترى في العلاقة الجنسية بين الكبار والصغار علاقة غير سوية (ولو أباحتها بعض التشريعات).

 

       هتك العرض، كناية قانونية لطمس الاغتصاب الشرجي

 

       إن قاتل عدنان متابع أيضا بارتكاب جريمة "هتك العرض". ماذا يعني هتك العرض؟ في الواقع يشكل "هتك العرض مجازا للتعبير عن الاغتصاب الشرجي الممارس على الرجل أو المرأة على حد السواء (الفصلان 484 و485 من القانون الجنائي المغربي). وبالتالي فإن إيلاج الذكر في شرج المرأة دون موافقتها لا يعتبر اغتصابا، بل هتك عرض. هل يعكس استعمل هذا المصطلح من طرف المشرع إرادة في عدم الإخلال بالحياء العام؟ هل القانون الجنائي قانون محتشم لا يريد ذكر الشرج؟ أطروحة مرفوضة انطلاقا من تعريف الاغتصاب في نفس القانون: الاغتصاب هو الفعل الجنسي الممارس ضد المرأة دون موافقتها (الفصل 486). وبالتالي لا يمكن للرجل أن يكون ضحية اغتصاب. الفتيات الصغيرات غير البالغات والبالغات، الشابات العوازب والنساء المتزوجات والنساء المسنات وحدهن موضوع اغتصاب. وبالتالي نستنتج أن المرأة يمكن أن تكون موضوع هتك عرض وموضوع اغتصاب في حين لا يمكن للرجل أن يكون سوى موضوع هتك عرض فقط. هنا نفهم لماذا لا يستعمل القانون الجنائي مصطلحي الشرج والفرج كأماكن الإيلاج القسري. فمرة أخرى لا وجود لاحتشام في عدم ذكر الفرج وإنما تمييز بينهما من خلال التمييز بين هتك العرض والاغتصاب. فهتك العرض هو ولوج الرجال والنساء قسرا من الشرج في حين يعني الاغتصاب ولوج النساء قسرا من الفرج. لذا لا يقول القانون الجنائي بإمكانية اغتصاب الرجال فالرجال لا فرج لهم بالمعنى البيولوجي العلمي.  للنساء وحدهن فروج رغم أن القرآني يسمي الأعضاء التناسلية الذكرية فروجا أيضا: "والذين هم لفروجهم حافظون إلا على أزواجهم أو ما ملكت أيمانهم..." (المؤمنون، الآية 5).

       إن التمييز بين هتك العرض والاغتصاب يبين أن الاختلاف البيولوجي بين الشرج والفرج اختلاف محدِّد للقانون الجنائي لتعريف الجرائم. فاغتصاب الفروج أخطر من هتك الشروج لأن اغتصاب الفروج هو هتك الأعراض الحقيقي من المنظور البطريركي ـ الإسلامي. ففي الاغتصاب خطر إفقاد الفتاة عذريتها والأسرة شرفها، وفيه خطر اختلاط الأنساب والأموال من جراء حمل قبل الزواج أو خارجه. أما الشرج فقاسم مشترك بين المرأة والرجل وهو عضو غير مميز لهما معا. لذا ذهب القانون الجنائي لاعتبار الفرج وحده مكان اغتصاب، والاغتصاب يهم فقط الجسد النسوي والجسد العائلي (الشرف)، بل والجسد الإسلامي بحيث الاحتفاظ شرعا وقانونا بفروج المسلمات لذكور المسلمين. لا سبيل إذن في منطق القانون الجنائي للحديث عن اغتصاب الرجال فالرجال لا فروج لهم ولا غشاء بكارة لهم ولا عذرية لهم ولا خطر افتضاض يهددهم. وتتجلى أهمية الافتضاض المحورية حين ينص القانون الجنائي على أن عقوبة الاغتصاب مع الافتضاض ضعف عقوبة الاغتصاب دون افتضاض وضعف عقوبة هتك العرض.

       آن الأوان لتصحيح هذا التمييز الجنسوي (sexiste) بين هتك العرض والاغتصاب وللنظر إليهما معا كاغتصاب من نفس الوزن لأن كلاهما إيلاج قسري كيف ما كان جنس/جندر المغتصَب. إن كل إيلاج فرجي أو شرجي أو فمي دون رضا من المولَج فيه اغتصاب، فهو اكتساح واحتلال لجسد الضحية وخرق لحدوده الجسدية الفاصلة بين الداخل والخارج. فولوج أي جسد دون جواز ولوجه من طرف صاحب(ت)ه اغتصاب. لا بد من الإقرار بمساواة كل ثقوب الجسد. فالأهمية المعطاة للفرج ولغشاء البكارة وللعذرية، تلك الملكيات الثلاث للأنا العائلي القبلي، مرآة تعكس وتعزز النسق البطريركي.

       هنا تتدخل التربية الجنسية الشاملة بالضرورة لأنها قائمة على مبدأ المساواة بين كل الفاعلين الجنسيين (بغض النظر عن جنسهم/جندرهم وعن هويتهم الجندرية وعن توجههم الجنسي وعن وضعهم الزوجي). من هنا تساهم التربية الجنسية في وضع قانون جنائي مساواتي غير قائم على الجندر. لكن ولميزتها هاته بالضبط، أي القول بالمساواة بين الجنسيين وبين كل الجنادر وبين كل الجنسانيات، وبالحرية المصاحبة لتلك المساواة، تلقى التربية الجنسية الشاملة معارضة شديدة من طرف أكثرية المغاربة. فقدرتها على الوقاية من الأمراض المنقولة جنسيا ومن الحمل غير المقصود ومن العنف الجنسي والجندري لا تشفع لها أمام تلك الأكثرية. بالنسبة لتلك الأكثرية الصامتة الجاهلة لكن المؤثرة سياسيا رغم أنها غير مسيسة، ما يهم هو أن التربية الجنسية تحريض على الفساد الجنسي وتهديد للأخلاق البطريركية المقدسة باسم إسلام سائد كما حدده فقهاء سائدون. بالنسبة لتلك الأكثرية كما بالنسبة لفقهاءها، لا أخلاق خارج الأخلاق البطريركية الدينية، وهذا خطأ توطالِتاري ذريع. ذلك أن الأخلاق المدنية المواطِنة تشكل اليوم بديلا أكثر ملائمة للمجتمع المغربي الحداثي، وكل المجتمعات حداثية وإن بدرجات متفاوتة، فهي أخلاق تعطي الفرد حق اختيار معاييره وسلوكاته الجنسية وتُحمِّل الفرد مسؤولية اختياراته مع ضرورة التعايش مع معايير وسلوكات كل آخر آخر في إطار وطن جامع موحِّد.

       وبالتالي على السلطات العمومية أن تتحرر أولا من ثقل تلك الأكثرية الاجتماعية وأن تصحح الصورة الاجتماعية السلبية للتربية الجنسية وأن ترتقي بالأخلاق الجنسية من المنظور البطريركي إلى المستوى المدني. ثانيا عليها أن تضع سياسة جنسية عمومية تتضمن خطة عمل وبرامج لتكوين المربين من آباء وأساتذة وإعلاميين في التربية الجنسية الشاملة. ثالثا، عليها مأسسة التربية الجنسية في كل أسلاك التعليم (من الروض إلى الجامعة).

 

        خاتمة

 

       إن التربية الجنسية أداة تنمية موارد الوطن البشرية وأداة تحويل تلك الموارد إلى موارد مواطِنة. إنها أداة لا حق للمغرب في إهمالها أو في التحايل عليها من خلال الوقوف عند تقنياتها دون الأخذ بقيمها الإنسية المساواتية والتحريرية. على أقل تقدير، تشكل التربية الجنسية لقاحا بنيويا ضد وباء البيدوفيليا، البنيوية بالخصوص، الذي يؤشر على أن المغرب جسد اجتماعي مريض، جنسيا أيضا.

      

 

 

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19 septembre 2020 6 19 /09 /septembre /2020 07:26

 

         Un enfant sauvagement violé et tué, des parents meurtris, une population marocaine choquée et horrifiée, prête à lyncher le pédophile tueur, un Roi compatissant qui présente ses condoléances aux parents d’Adnane.

         En tant que citoyen, je ne peux que joindre ma voix à celle déjà exprimée par ces millions de Marocains survoltés à juste titre contre ce « monstre moral ». A mon tour, je ne peux que condamner fermement cet acte horrible sans toutefois basculer dans l’esprit de la vengeance et de la contre-violence.

         Dans ce papier, j’aimerais traiter de quatre questions en tant que sociologue :

         1) comment le pédophile est-il en même temps un malade et un criminel?

         2) comment la société marocaine est-elle prompte à condamner un acte pédophile ponctuel médiatisé contrairement à la complicité qui la caractérise lorsqu’il s’agit d’actes pédophiles structurels intégrés ?

         3) quel rôle l’éducation sexuelle peut-elle jouer dans la prévention de ces deux formes d’actes pédophiles ?

         4) Quelle est la signification la distinction entre les notions d’attentat à la pudeur et de viol et pourquoi faut-il la supprimer du code pénal en raison de sa discrimination fondée sur le genre ?   

   

         La pédophilie comme faits ponctuels divers

 

         Pour la psychiatrie, la pédophile est une maladie mentale, une paraphilie incurable. Le pédophile est donc et avant tout un malade dangereux de par la violence meurtrière qu’il est susceptible d’exercer contre sa victime. Cependant, et il ne faut pas cesser de le rappeler, la pédophilie est paradoxalement une « maladie mentale transitoire » qui touche de manière ponctuelle des gens normaux ayant une vie courante normale, et qui sont loin d’être des obsédés sexuels pervers. Ce sont des gens « insoupçonnables » de pédophilie tueuse jusqu’au moment où ils accomplissent leur acte pédophile tueur la première fois. Ce sont des gens ayant subi dans 33% de cas des agressions sexuelles durant leur enfance et/ou qui n’ont pas d’estime de soi pour des raisons liées à une enfance malheureuse. Le viol et le meurtre de l’enfant procurent aux « pédophiles » tueurs un sentiment de puissance et de survalorisation de soi. Leur passage à l’acte, tout en étant parfois planifié de manière rationnelle, obéit à des mécanismes psychologiques inconscients et non maîtrisables. Il s’agit alors de distinguer entre la personne et ses actes pédophiles, ceux-ci étant des actes ponctuels et compulsifs, imprévisibles, surtout la première fois. Les enfants des classes populaires et précaires, les moins protégés sont les victimes les plus nombreuses de ces actes ponctuels.

         Face au pédophile ponctuel, ce malade/criminel, maladie et criminalité ne s’excluant pas ici,  psychiatres et magistrats ont alors à répondre aux questions suivantes : dans quelle mesure le pédophile est-il responsable de ses actes ? Où doit-on l’envoyer ?  A l’hôpital pour une psychothérapie afin de le réinsérer dans la société ? A l’hôpital pour une castration chimique qui le rendrait incapable de récidive ? Doit-on le laisser en liberté et le maintenir à distance grâce à un bracelet GPS ou grâce à un contrôle par internet du lieu où il se trouve ? Incurable, faut-il s’en débarrasser définitivement en le condamnant à la prison à perpétuité? Ou en le condamnant à mort dans les pays où la condamnation à mort est prévue par la loi pour sanctionner un meurtre ? En exécutant impérativement sa mise à mort ? Les réponses à ces questions varient selon les cas et selon les législations nationales.

 

         La pédophilie comme fait social structurel

        

         En plus de cette pédophilie maladive tueuse, d’autres formes de pédophilie existent.

         Il y a les pédophiles de circonstance, ces hommes qui prennent les enfants pour des cibles sexuelles par défaut dans une société marocaine qui interdit les rapports sexuels consentis entre adultes. Un homme sexuellement frustré peut se tourner vers les enfants par défaut, vers les garçons notamment parce que ceux-ci sont plus accessibles et parce qu’ils présentent moins de risques sociaux (ils n’ont pas de virginité à perdre et ne tombent pas enceints). Pire, la tradition marocaine avait quasiment intégré cette pédophilie par défaut dans ses us et coutumes. Que de fois entend-on encore dire que tel homme  « aime » les enfants, sous-entendant par-là qu’il aime sodomiser les garçons. On le dit avec un sourire de complicité et de compréhension. On ne voyait là rien de méchant ni de grave. Le proverbe dit même que l’enfant n’apprend que s’il passe sous le « ventre » du maître de l’école coranique et du maître artisan. Agresser sexuellement les enfants mâles est encore une soupape de sécurité sexuelle plus ou moins normalisée.

         Il y a également ces petites filles qu’on viole sans déflorer et sans qu’il y ait de déclaration/plainte de la part des parents, ceux-ci estimant que ce viol n’est pas grave et qu’il n’en est pas un du moment que l’hymen est encore intact. Ou le fait de marier des filles mineures à des hommes d’âge mûr pour des raisons économiques ou par crainte du « déshonneur ». Ce sont là deux manières d’encourager les pédophiles et de normaliser leur comportement.

         Il y a aussi la triste complicité de certains parents marocains qui vendent les services sexuels de leur enfant à des touristes étrangers et qui poussent ainsi leur enfant à se prostituer. La notion de consentement de l’enfant n’est pas posée, elle n’est même pas conçue dans les cas où l’enfant se prostitue volontairement. L’enfant devient un travailleur sexuel exploité par ses parents.

         Il y a enfin l’exploitation sexuelle des enfants de la rue et celle des petites bonnes dans les espaces nocturnes public et privé.

         Là encore, ce sont les enfants des classes sociales populaires qui sont les plus touchés par la pédophilie structurelle.

         Ces différentes formes de pédophilie constituent un fait social établi. Elles expriment une pédophilie structurelle et structurante, socio-culturellement normalisée et, pire, juridiquement organisée dans les cas des mariages des filles mineures. Même si elles sont plus nombreuses et même si elles traversent la société de part en part, la lutte contre ces pédophilies « chroniques » est moins visible. En tant que fait social qui fait partie de la vie courante et ordinaire, elles ne sont ni aussi spectaculaires ni aussi médiatisées que le viol et le meurtre d’un enfant par un pédophile. Contrairement à cette pédophilie ponctuelle qui reste statistiquement négligeable et non significative, la pédophilie structurelle est sociologiquement significative. Ceci étant, et eu égard à son « mal de voir », il est plus facile pour la société marocaine de crier haro sur un malade mental, criminel certes, que de s’auto-critiquer. Si pour la loi, le bourreau d’Adnan est poursuivi à la fois pour attentat à la pudeur et pour meurtre, pour la société il n’est au fond et en dernière analyse accusé que de meurtre, le viol d’un garçon qui survit à son viol étant encore considéré comme « pas si grave que ça ». C’est la société civile qui a tiré la sonnette d’alarme sur la gravité des viols des garçons.

         Pour le sociologue, les deux pédophilies sont graves même si la pédophilie ponctuelle relève d’abord de la psychiatrie avant de relever de la justice, et même si la pédophilie structurelle engage toute une société, quitte à en faire le procès. L’acte populaire accusateur de la pédophilie tueuse ponctuelle est juste, mais il se doit d’aller au bout de lui-même et se retourner contre soi afin de rester juste et dénoncer aussi les pédophilies structurelles que la société marocaine produit et reproduit à la chaîne. Il doit se transformer en acte citoyen.

        

         L’éducation sexuelle, cette nécessité publique

 

         Face aux deux pédophilies ponctuelle et structurelle, l’éducation sexuelle des adultes est nécessaire. L’éducateur est à éduquer dans une société marocaine qui se dresse avec force contre un acte solitaire de pédophilie ponctuelle, un fait divers en dernière analyse, et qui se tait devant la pédophilie structurelle qui la caractérise et qui l’incrimine.

         A l’occasion du viol meurtrier d’Adnane, des voix ont réclamé l’institution d’une éducation sexuelle comme moyen de prévenir la pédophilie. Il est vrai, et je n’ai pas cessé de l’écrire et de le dire depuis 1997, que l’éducation sexuelle est une nécessité publique au Maroc afin de prévenir les violences sexuelles et sexistes (entre autres). Mais de là à croire que l’éducation sexuelle peut identifier à l’avance le pédophile violent et tueur, il y a un pas épistémologique à sauter, que je ne saurais sauter. En fait, l’éducation sexuelle peut habiliter l’enfant à identifier le danger sexuel en cas de tentative de séduction de la part d’un pédophile abuseur qui cache ses intentions sexuelles et qui trompe l’enfant sur ses intentions véritables. Elle peut apprendre à l’enfant à avertir ses parents ou à leur en parler a posteriori pour une thérapie post-traumatique. Elle habilite également les parents à dialoguer sur la sexualité de manière ouverte et saine avec leurs enfants. Mais l’éducation sexuelle n’est d’aucune efficacité lorsque l’enfant est face à un pédophile qui le détourne/kidnappe, le séquestre, le viole et le tue. Elle n’est non plus d’aucune efficacité pour prévenir l’acte pédophile chez le pédophile lui-même. On a beau enseigner l’éducation sexuelle dans les écoles des pays occidentaux sans pour cela empêcher le pédophile de s’arrêter aux niveaux de l’acte pédophile séducteur ou prostitutionnel, ni de passer à l’acte pédophile violent et meurtrier.

         Par contre, l’éducation sexuelle est très efficace en matière de prévention et de lutte contre les pédophilies structurelles. Et c’est le plus important.

        

         L’attentat à la pudeur, une métaphore juridique du viol anal

        

         L’auteur de l’agression sexuelle contre Adnane est poursuivi (également) pour attentat à la pudeur. Que signifie l’attentat à la pudeur ? En fait,  l’attentat à la pudeur est une métaphore que le Code Pénal emploie pour dire le « viol anal » exercé indistinctement contre une personne de sexe masculin ou féminin (articles 484 et 485). Ainsi une pénétration anale d’une femme non consentante n’est pas un viol, mais un attentat à la pudeur Ce non-emploi de la notion de « viol anal » par le Code pénal exprimerait-il une volonté du législateur de ne pas porter atteinte à la pudeur publique ? Le code pénal serait-il pudique ? Cette hypothèse est balayée par la définition même du viol par le code : le viol est exclusivement l’acte sexuel exercé sur une femme contre son gré (article 486). Il s’ensuit que la personne de sexe masculin ne peut pas être l’objet d’un viol. Seules les petites filles impubères et pubères, les jeunes filles célibataires et les femmes mariées sont objet du viol. Pour résumer, l’attentat à la pudeur, c’est prendre de force hommes et femmes par derrière tandis que le viol, c’est prendre les femmes par devant.

         Cette distinction montre que la différence sexuelle est au fondement du code pénal marocain,  l’hymen femelle serait le prétexte qui justifie la discrimination de genre qu’il opère: n’ayant ni hymen ni virginité, on ne saurait parler de viol du garçon ou de l’homme, et encore moins de leur défloration comme circonstance aggravante comme c’est le cas pour les jeunes filles. En effet, le soubassement anthropologique culturel du code pénal le conduit à considérer le viol d’une jeune fille avec défloration comme plus grave que celui d’une jeune fille déflorée. La réclusion est doublée.

         N’est-il pas temps de corriger cette discrimination sexiste et nommer pareillement et sur le même pied d’égalité toute agression sexuelle pénétrante contre une personne comme viol, et ce quel que soit son sexe? Toute pénétration sexuelle (vaginale, anale ou buccale) d’une personne non consentante est un viol par définition car il s’agit d’une invasion de son territoire corporel, d’une violation des frontières de son corps, celles qui représentent la limite entre l’extérieur et l’intérieur. Pénétrer un corps sans « passeport » est un viol de ce corps quel que soit le sexe de ce corps.

         L’importance accordée à l’hymen et à la virginité, ces deux propriétés du Moi tribalo-familial, exprime une logique patriarcale systémique et la renforce. C’est là que l’éducation sexuelle fondée sur le postulat de l’égalité de tous les acteurs sexuels (indépendamment de leurs sexe/genre, identité de genre, orientation sexuelle et situation matrimoniale) devrait normalement déboucher sur la production d’un code pénal égalitaire, non fondé sur le genre. Mais c’est justement ce postulat de l’égalité des sexes, des genres et des sexualités, et de la liberté qui en découle, qui pousse la grande majorité des Marocains à refuser l’éducation sexuelle malgré sa capacité de prévention des IST, des grossesses non désirées et des violences sexuelles et sexistes. Pour cette majorité silencieuse inculte mais politiquement pesante (tout en étant apolitique), l’éducation sexuelle est tout simplement une incitation à la débauche sexuelle…

         Aux pouvoirs publics de se libérer de la pesanteur sociale et de corriger cette image sociale négative de l’éducation sexuelle, d’institutionnaliser l’éducation sexuelle à tous les niveaux de l’enseignement et d’élaborer des programmes de formation en la matière à l’adresse des professeurs, des médias et des familles. L’éducation sexuelle est un outil de développement des ressources humaines de la nation, un outil qu’on n’a pas le droit de négliger.

 

 

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12 septembre 2020 6 12 /09 /septembre /2020 12:12

 

 

Mourir « grâce » au Coronavirus :

une opportunité de se libérer d’une vie de misère[1]

 

        

       Comment vivre avec le Coronavirus ?

    

         C’est la grande question à laquelle nul n’a de réponse, ni la population, ni les chercheurs, et encore moins les gouvernants. D’un côté, on a l’impression que les autorités maitrisent leur sujet. Nous le voyons au niveau de la production de chiffres quotidiens dont la fiabilité semble incontestable. De l’autre côté, on soupçonne une sorte de maldonne. Ces chiffres ne sont-ils pas gonflés depuis le dé-confinement dans le but d’accentuer la psychose collective ? Les tenants de la théorie du complot estiment en effet qu’un stratagème obscur et mondial voudrait amener les populations à se faire administrer un vaccin suspect. Pour cela, le virus est présenté comme se diffusant massivement afin de rendre la prise de ce vaccin (à venir) volontairement incontournable, voire obligatoire. Cette théorie du complot avance que le but ultime est de parvenir à une relaxation démographique, à débarrasser le monde, et le Maroc par ricochet, des personnes physiquement, psychologiquement, socialement, économiquement vulnérables. En d’autres mots, les vieux, les malades chroniques, les non-productifs, les nuisibles… La pandémie provoquée aurait comme objectif secret un eugénisme qui ne garderait vivants que les plus forts.

         Au niveau de la population, j’observe un paradoxe. La peur est palpable.  Les gens s’évitent en situation « normale », par exemple en marchant dans les rues, sur les boulevards. Seulement, dès qu’une foule se forme dans des lieux comme les souks et les marchés, les gens se parlent sans masques, sans distanciation, collés les uns aux autres, sans précaution aucune. On observe le même phénomène devant les bureaux des communes urbaines pour chercher un extrait d’acte de naissance ou un certificat de résidence, légaliser une signature ou une photocopie.  Là, la conscience du danger semble disparaître. L’intérêt immédiat fait oublier toute prévention. Et on laisse les gens s’entasser ainsi dans la rue, de manière dangereuse, de manière indigne, comme du bétail.

 

       Une scolarité paradoxale

         Là, je relève un paradoxe logique et inégalitaire : les quartiers pauvres sont les plus touchés par le virus et les élèves seront par conséquent soumis à l’enseignement « distanciel » sans disposer de tous les moyens que cet enseignement nécessite. Par contre, les quartiers nantis qui sont beaucoup moins affectés par le virus, et qui jouissent des moyens de s’équiper en vue d’un enseignement à distance, seront ceux qui bénéficieront le plus de l’enseignement « présentiel ». Cela exacerbera le sentiment d’injustice parmi les populations qui vivent dans la précarité. Les catégories sociales démunies souffriront d’une double sanction alors : d’une part un enseignement à distance « médiocre » et souvent inaccessible à cause d’une connectivité absente, d’autre part une vulnérabilité plus grande à la contamination. Le Covid 19 reflète ainsi les disparités sociales et les accentue. Le logement en est une autre preuve.  Au lieu d’être une cuirasse contre le Covid 19, les logements prolétaires et précaires exigus et surpeuplés ne constituent pas un deuxième corps qui protège les corps humains qui y vivent. Ils ne permettent pas la distanciation physique intrafamiliale. Les membres entassés d’une même famille deviennent ainsi un danger les uns pour les autres. Chaque membre de la famille précaire devient un infecté potentiel, un infectant potentiel, et devient un enfer qu’il est impossible d’éviter.

 

       Une équation insoluble

         Oui car il faut concilier entre trois valeurs fondamentales : la santé, l’emploi et la liberté (de circuler, de se rencontrer, de se réunir, de faire la fête…). Lorsque le confinement est strict, l’emploi en pâtit. A l’inverse, lorsque le déconfinement s’opère, l’emploi et la liberté renaissent mais le virus se propage davantage et plus vite. Alors comment faire pour concilier entre ces différents paramètres de la vie en société ? Je vous l’avoue, je n’aimerai pas être à la place des décideurs en ce moment. Ceux-ci sont manifestement perdus. Face à l’augmentation des chiffres de la pandémie, ne pouvant pas agir selon des politiques publiques bien établies, avec des stratégies et des plans d’action bien clairs, les décideurs improvisent, ils bricolent. On verrouille villes, quartiers, entreprises et écoles lorsque le nombre des cas devient alarmant et ça s’arrête là. Au niveau de la population, les comportements sont contradictoires. Personne ne veut être infecté mais personne ne veut renoncer à sa liberté et à ses plaisirs. Sortir, aller au café, profiter de la plage et du soleil sont des actes qui exprime un besoin psychologique vital sans pour autant être accompagné par un souci adéquat de se protéger et de protéger les autres. En somme, dans cette situation inédite, nous assistons à un bricolage généralisé aux niveaux politique, sanitaire, social et individuel.

 

       Le Marocain, un citoyen avorté

         Au lendemain de chaque épidémie, les gens sont comme assoiffés de vie et de plaisirs. Ils se lancent dans une consommation plurielle et tentent de rattraper le temps perdu. Mais de mon point de vue, un autre facteur structurel explique l’explosion des nouvelles infections dans notre pays : il s’agit de l’absence de morale civile, de citoyenneté. C’est cela qui fait que dans d’autres pays, porter le masque soit devenu un réflexe national : on se préserve pour préserver les autres ainsi que la nation-mère. Le Marocain, hélas, n’a pas encore accédé au rang de citoyen total. Il n’est pas un citoyen parce que les différents pouvoirs ne le traitent pas en tant que tel. Pire, ils ne le construisent pas en tant que citoyen. Les pouvoirs publics ne s’adressent au Marocain en tant que citoyen que pour lui rappeler ses devoirs envers la nation, mais le priver de ses droits fondamentaux élémentaires, ne pas respecter sa dignité et le vouloir servile, tout cela l’empêche d’être citoyen. Par conséquent, l’injonction intérieure de s’acquitter de son devoir moral de citoyen n’existe pas chez lui. Il se dit : « pourquoi exige-t-on de moi, moi petit marocain, de respecter mes devoirs civiques, alors que la corruption est endémique, que les élites censées donner l’exemple s’en abstiennent en toute impunité… Le proverbe ne dit-il pas que pour laver les escaliers, il faut commencer par le haut ». Le Marocain lambda se complaît alors dans une sorte de je-m’en-foutisme. A moins qu’un agent d’autorité n’exerce un contrôle tangible sur leur comportement, la majorité des Marocains ne respectent pas les injonctions d’un pouvoir qui ne les respecte pas, et qui ne les habilite pas à respecter la loi, à l’intérioriser. Le respect des gestes barrières en tant que gestes imposés par les pouvoirs ne s’est pas encore transformé en réflexe national. Car les Marocains n’ont pas tous ni la capacité de s’équiper en masques ni celle de payer une amende de 300 DHS ni celle de respecter l’application de la loi.  Et on ne peut pas vraiment emprisonner tous les contrevenants pour défaut de paiement. Encore faut-il pouvoir verbaliser tous les contrevenants. Dans ce contexte, la transgression majoritaire des gestes barrières est donc inéluctable, elle devient périlleuse. Cette transgression découle à la fois de l’absence de morale civique, d’une insuffisance de moyens, mais aussi d’un réflexe social grégaire encore très largement répandu. Ce qui est évidence sanitaire préventive ne s’est pas encore transformé en évidence sociale.

        

         Mourir, un hrig vertical, une libération

         Les Marocains défavorisés pensent que les riches courent moins de risques d’attraper le virus et/ou d’en mourir. Ils s’estiment être les offrandes sacrificielles de la pandémie du Coronavirus. Leur credo est alors « Li Liha liha ». Se considérant comme déjà (symboliquement) morts, mourir pour de vrai « grâce » au Coronavirus est perçu comme une opportunité de se libérer d’une vie de misère, voire une « chance » de mourir en martyr, d’émigrer vers le paradis. Avec ou sans le coronavirus, pour beaucoup de Marocains, la vie au Maroc ne vaut pas la peine d’être vécue...

 

 

 

 

[1] Publié par Telquel le 11 septembre 2020.

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19 juin 2020 5 19 /06 /juin /2020 22:38

الاغتصاب، بين الطبيب والرجل العادي

بقلم الدكتورعبد الصمد الديالمي

ترجمة: ناصر السوسي

 

باعتباره ظاهرة اجتماعية، يتوجب تحليل الاغتصاب في علاقته بالمتغيرات السوسيو- ديموغرافية وبظواهر اجتماعية أخرى. وهو ما يقتضي تفسير الاجتماعي بالاجتماعي. فالاغتصاب يحيل إذن إلى عوامل اجتماعية وثقافية تجعله يندرج ضمن تخصص عالم الاجتماع والأنثروبولوجي، وهما العالمان المؤهلان أكاديميا لتشخيص المحددات الاجتماعية والثقافية للاغتصاب.

أيضا، الاغتصاب موضوع من تخصص عالم النفس. فهو المسؤول عن معالجة آثار الاغتصاب السلبية في نفسية المرأة المغتصبة. وهو المؤهل لفهم نفسية الرجل المغتصب، ذلك الرجل الذي قد تعرضه حالة العود إلى إخصاء كيميائي، وهو عمل من مهام طبيب الأمراض العقلية تنفيذا لحكم قضائي جنائي.

 والواقع أن أول مهني يتدخل في معالجة الاغتصاب هو الطبيب. فهو الذي من صلاحياته القيام بتشخيص وقوع الاغتصاب وتقديم العلاجات الأولية الضرورية. ومن التدابير الوقائية الأولى التي على الطبيب القيام بها، تشخيص احتمال الإصابة بفيروس السيدا والأمراض المنقولة جنسيا، واحتمال الحمل اللاإرادي وإيقافه بفضل الحبة المجهضة إن كانت المرأة المغتصبة لا ترغب في الاحتفاظ بحملها (إن كان القانون يسمح بذلك)، تجنبا لاحتمال إجهاض سري خطير ولولادة غير مرغوب فيها ولقتل مواليد جدد أو التخلي عنها.

لكن الطبيب، ولو كان متخصصا في طب النساء والتوليد أو حتى أستاذا في هذا التخصص، فليس مؤهلا علميا للقيام بتشخيص المحددات الاجتماعية والثقافية للاغتصاب. فإذا غامر في هذا الميدان فسيكون بفعله ذاك قد تجاوز مجال مؤهلاته الأكاديمية. إن اقتحامه لتلك المحددات يجعله يكف عن أن يكون طبيبا. فنلفيه إما يعيد تحليلات سوسيولوجية أو أنثروبولوجية دون إشارة إلى مراجعه، وإما يعيد تكرار آراء عادية للإنسان العادي. آراء يسمها كره شديد للمرأة ويميزها استعلاء رجولي بشكل عام. ومن المحقق أن هذه الآراء هي آراء رجل الشارع الذي يتهم النساء بكونهن هن المسؤولات عن الاغتصاب الذي يتعرضن إليه. ومعلوم أن مثل هاته الآراء يوظفها رجل الشارع كآليات دفاع لتبرئة نفسه من مسؤولية الاغتصاب. والأسوأ، بالنسبة لرجل الشارع هذا، سجين شباك اللاشعور البطريركي، أن اغتصاب النساء هو اغتصاب تأديبي مقصده تخويف النساء والحد من رغبتهن في الحرية وإعادتهن إلى" الطريق الصحيح"، إي إلى الخضوع (الجنسي) للرجال، عبر الزواج تحديدا.

لنسجل على سبيل الختم أن الطبيب، عندما يتبنى الرأي الرجولي المتنصل التصحيحي التأديبي في وسائل الإعلام الجماهيرية، فإنه يوهم المشاهد العادي أنه ينصت إلى طبيب. والواقع أن المشاهد العادي لا ينصت إلا لإنسان عادي مثله. من هنا يتبين أن الإنسان العادي الملفوف في زي الطبيب المرموق إنسان خطير لأنه يضلل إعلاميا ويحول دون الوعي النَّسَوي والجنسي، ويناهض بالتالي المساواة والحرية. وإنسان عاد كهذا، المتخفي في زي الطبيب، ينبغي إخصاؤه إعلاميا من أجل إيقاف الفيروس الإيديولوجي الذي ينشره وسط الجماهير.

إن مثل هذا "الحجر الإعلامي" إجراء وقائي من شأنه أن يساهم في الحد من جائحة "الأخبار الزائفة" البطريركية والكارهة للنساء.    

 

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